Mont Saint-Michel : passer de la fiction à la réalité

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par | Jan 15, 2016 | Actualités | 2 commentaires

O. S. sur la passerelleL’assemblée générale de l’association Vélocité, connue pour son combat pour l’accès au Mont Saint-Michel pour les cyclistes, a fait le plein. La présence du président de la FUB y a certainement contribué. Une issue est possible malgré l’aveuglement de l’Etat. 

AG le maire

L’ AG du 13 janvier 2016 a d’abord déroulé son lot de balades ornithologiques et de bourses aux vélos. Rien qui permette de payer un avocat, et encore moins des frais de justice. Rien de bien passionnant.

Avec l’affaire de la passerelle du Mont Saint-Michel on est passé à autrement plus croustillant. Et tout d’abord, la première impression qui se dégage du récit des évènements de ces 8 ans, c’est la faille entre l’Etat et les citoyens.

L’aveuglement de l’Etat

Nous voyons une justice qui ne juge que sur la forme (forme du Y. de la signature du maire, faculté qu’il a ou non de décider, limite de la commune, respect formel de règles …), sans s’inquiéter de la question réelle, qui est de savoir si l’interdiction des vélos sur la passerelle est justifiée ou non. La réponse par « raisons de sécurité » pète comme un argument arbitraire, non justifié en droit, et sans rapport avec la réalité.

Nous observons la représentante de l’Etat, la sous-préfète, qui accepte un rendez-vous tout en le déclarant d’emblée sans objet puisqu’il n’y aurait aucune possibilité de stationnement des vélos sur le Mont. Parfait déni des réalités, là aussi, puisque des emplacements ont été repérés par plusieurs autorités, ainsi que, dès 2011, par le bureau d’étude dûment mandaté.

piétons

Aveuglement de l’Etat ! n’hésite pas à dire Jean-Michel Blanchet, le président. Pour l’association, c’est l’Etat qui bloque la situation, car, dit son président, la discussion a pu être ouverte avec les autorités locales et des compromis sont sur le point d’être acceptés.

zone20 zone 20

Alors que faire ?

Faire simple 

Dans son intervention, Olivier Schneider, le président de la FUB (1), a appelé à ne jamais oublier quelques principes simples :

  • Tout point d’un territoire doit être accessible à pied et à vélo.
  • Le vélo n’est pas un gadget, c’est un véhicule qui fonctionne très bien.
  • Il est quelque peu hallucinant de voir que le rétablissement du caractère maritime du Mont, grande opération écologique, se traduise par l’utilisation de navettes au diésel et l’éviction des cyclistes.

barraquements autos navette

Casser le mythe
Il va falloir être fort pour lutter contre un mythe qui semble avoir présidé à la conception de la passerelle, selon l’association. Ce mythe, c’est … les grands pèlerinages du Moyen-âge !!! Sous ce rêve se serait cachée la priorité aux piétons et à des véhicules archaïques, voitures tirées par des chevaux ou navettes habillées de bois. La réalité pourtant c’est les autobus de touristes du monde entier qui n’ont même pas le temps de monter à l’abbaye, et c’est plus personne aux offices.
Seuls les cyclistes sont des touristes qui ont le temps … et d’ailleurs plusieurs voies vertes encore dans les cartons (vers Avranches et vers Pontaubault) pourraient bientôt renforcer le maillage des infrastructures qui drainent ces touristes-là.

Profiter des évolutions qui se présentent
La période de l’entre-deux tours dans la procédure juridique (2) est propice à des discussions. Un compromis pourrait porter sur la réduction à juillet-août seulement de l’interdiction des cyclistes, en attendant un assouplissement qui viendrait forcément. Le réalisme peut y pousser, car de quoi a-t-on l’air, pense sans doute le responsable du Tourisme départemental, de faire la promotion touristique d’une véloroute « De Notre-Dame de Paris au Mont Saint-Michel sans accès au Mont Saint-Michel » … drôle de pèlerinage, en effet ! Les élus semblent ouverts au dialogue, comme ils l’avaient été pour la mise en place des périodes de test.

Sortir des schémas simples
Ceci étant, d’autres propositions, plus ambitieuses, ont été formulées lors de la soirée. On peut les résumer, en suivant Jean-Michel Blanchet, par ces mots : Les cyclistes seraient autorisés à utiliser toute la passerelle, chacun sur la partie qui lui convient. Cela donne alors plutôt les touristes sur les trottoirs, car ils viennent pour admirer précisément ce paysage, font des photos, poussent leur vélo s’il y a trop de monde; les cyclistes qui habitent le coin sur la chaussée, s’ils le souhaitent, car ils vont plus vite, et ne risquent en rien de gêner les navettes ni de subir un accident (3).
A ce sujet, on s’est d’ailleurs aperçu que les navettes ne se croisaient que très peu, car la courbure de la passerelle ne leur permet pas de rouler collées à droite!

clous

Et pratiquement ?

C’est ainsi que deux solutions d’organisation propres à éliminer toute crainte de la part de l’exploitant ont été évoquées :

  • Créer un chaucidou, bande centrale de circulation motorisée + 2 bandes latérales sur lesquelles les navettes peuvent empiéter ponctuellement.
  • Créer une piste cyclable à double sens d’un côté, et une chaussée unique pour les navettes, ce qui correspondrait à la pratique, nous dit-on, puisque l’exploitation semble préférer des trains de navettes en aller-et-retour à des croisements délicats. Rien n’empêcherait d’ailleurs une certaine souplesse à l’occasion, notamment pour les véhicules des personnalités ou résidents !!

Pourquoi tant de difficultés a-t-on finalement demandé. Quel est l’argument inavoué, car inavouable, qui se cache derrière ces blocages ? Qui continue à croire à la dangerosité des cyclistes, et pourquoi ?
O. S. sur la passerelleEn attendant, l’appel auprès de la Cour administrative d’appel de Nantes va être déposé dans les jours qui viennent. La Convergence (12 juin), le départ du Tour de France (2 juillet), l’arrivée de Dynamobile (22 juillet), seront autant d’occasions de médiatisation … La dynamique récemment créée par la condamnation à payer une somme hors de toute réalité a renforcé l’association. Elle a désormais des adhérents et donateurs dans toute la France. Et, nec plus ultra, le président de la FUB a annoncé qu’allait être étudiée la création d’un fonds de soutien aux actions en justice ! Mieux vaudrait vraiment négocier, et que la réalité l’emporte enfin sur la fiction.

 

 

 

  1. FUB : Fédération des usagers de la Bicyclette, à laquelle adhère Vélocité.
  2. L’association a été déboutée par le tribunal administratif de Caen. Voir Isabelle et le vélo, 18 décembre 2015 (en bas d’article, liens vers les articles antérieurs sur le même sujet).
  3. Cette liberté de choix a été mise en oeuvre à Lorient (mais je ne l’ai pas vue); la cohabitation vélos – transports en commun sur voie en site propre se passe bien, malgré un trafic bien plus dense et difficile, à Paris (voir l’article du 11 novembre 2014).
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Jean-Jacques
8 années

Pour « prendre la roue » du titre de cet article : il serait grand temps que la réalité l’emporte sur l’affliction et les frictions :-))

Pressicaud
8 années

Je suis bien d’accord avec ce diagnostic d’un Etat finalement assez responsable de la situation de blocage, avec des actions et des partis pris incohérents entre eux et, souvent, « de principe », passablement déconnectés des réalités.
Moi qui commence à bien connaître les fonctionnaires, j’en arrive à considérer que plus le niveau de responsabilité est élevé, moins on se sent en droit de se dédire : l’Etat (ou son représentant) « sait » et se prononce ; et il ne revient pas en arrière – question, à ses yeux, de crédibilité et d’honneur. Il y a tout de même dans tout ça, sur le fond, une affaire de « logiciel » : le vélo est une lubie d’écolo ; c’est un outil qui ne devrait plus faire partie de la mobilité. Dès lors, la plupart des arguments avancés sont là pour justifier a posteriori des positions intenables face à la réalité. Je pense que notre Etat ferait bien rire les fonctionnaires homologues néerlandais ou danois. Bon courage à Vélocité ; tenez bon, gardez espoir : je suis convaincu que vous aboutirez.

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