La prime à l’achat d’un vélo assisté (VAE) est rétablie sous une nouvelle forme

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La prime à l’achat d’un VAE vient d’être rétablie.
Prime à l’achat et indemnité kilométrique seront donc à l’ordre du jour de la rentrée. Est-on vraiment sûr que ce soit l’essentiel ?
Avis de la Fub ajouté le 5 janvier à 21 h 15.

Par décret paru au Journal officiel le 31 décembre 2017, une aide à l’achat des VAE est créée. Elle pourra être attribuée aux personnes résidant en France non-assujetties à l’impôt sur le revenu et uniquement en complément d’une aide du même type attribuée par la collectivité locale. Le total de ces deux primes ne pourra dépasser 20% du prix d’achat, ni 200 €.

Décret n° 2017-1851 du 29 décembre 2017 relatif aux aides à l’acquisition ou à la location des véhicules peu polluants. 
Il modifie le code de l’Energie : 
Article D251-2

Une aide, dite bonus vélo à assistance électrique, est attribuée à toute personne physique majeure justifiant d’un domicile en France, dont la cotisation d’impôt sur le revenu de l’année précédant l’acquisition du cycle est nulle, un cycle à pédalage assisté, au sens de l’article R. 311-1 du code de la route, neuf, qui n’utilise pas de batterie au plomb et n’est pas cédé par l’acquéreur dans l’année suivant son acquisition.
Cette aide ne peut être attribuée que si une aide ayant le même objet a été attribuée par une collectivité locale.
Une personne physique ne peut en bénéficier qu’une fois.
Article D251-7-1
Le montant de l’aide instituée à l’article D. 251-2 complète le montant de l’aide allouée par une collectivité locale sans jamais lui être supérieur et ne peut avoir effet de porter le cumul des deux aides au-delà du plus faible des deux montants suivants :
– 20 % du coût d’acquisition toutes taxes comprises ;
– 200 euros.

La prime avait été instituée en février dernier[1. Sur la première version de la prime VAE, voir l’article 200 € (pas “de plus”) pour passer au VAE.], et les seules différences entre les deux textes sont qu’avant c’était soit prime locale, soit prime de l’Etat (et donc en pratique celle-ci n’était demandée qu’en l’absence d’une prime locale) et que maintenant on ne peut demander celle de l’Etat que s’il y en a une au niveau local et que si on est non-imposable. En résumé l’Etat complète pour les pauvres l’aide des communes[1. Le journal Notre Temps, cité par Libération, révèle qu’une quinzaine seulement de communes ont une prime à l’achat d’un VAE !!! L’Etat ne va pas se ruiner!] à l’achat d’un objet qui de toutes façons restera cher[1. Petit calcul basique. VAE premier prix à 1500€; 20% = 300€; aide limitée à 200 €; reste à charge 1300€.].

Je voudrais bien voir l’influence que cela aura sur les montants proposés localement[1. On parle déjà de Nantes et Bourges qui avaient supprimé leur prime puisque l’Etat en donnait une. Ces villes vont-elles en re-créer, et au même montant qu’avant, ou juste à 100 €, maximum, pour déclencher la prime de l’Etat, qui ne doit pas excéder 50% du total? Dans ce cas les automobilistes aisés ne sont plus concernés, car imposables, et les non-imposables feraient mieux de ne pas se laisser tenter.] et sur la dépense effectivement engagée par l’Etat. Peu importe, voici une façon discrète de revenir sur une annulation qui avait fait mauvais genre, et dont la justification par le Premier ministre par le fait que « la filière » n’en aurait plus besoin[1. Sur la justification de l’abandon de la prime VAE, voir Assises de la mobilité : Que doit contenir la Loi ? Introduction.] était assez mal venue. Au-delà de cet aspect on ne voit guère l’avantage de cette mesure telle que rédigée.

Le résultat devrait être paradoxal.
Si vous êtes fauché et que vous avez réellement besoin d’un VAE, il vaudrait mieux que celui-ci soit acheté par un organisme et qu’il vous soit prêté ou loué. Car votre achat cher a aussi pour grave inconvénient qu’il se répare très mal et vieillit très vite, sans même évoquer la convoitise qu’il suscite.
Mieux vaut un bon vieux vélo de 30 ans retapé à neuf et payé peu qu’un VAE neuf et cher qui dans 5 ans ne vaudra plus rien, aide à l’achat ou pas !
Et je ne vous parle même pas d’écologie… qui pourtant devrait être un critère non-contournable de toute décision.
Si vous êtes aisé, l’aspect seulement symbolique aurait justement pu vous aider à décrocher de la voiture.

L’an dernier l’IKV aurait pu être améliorée 
Juste avant la fin de l’année il a également été question que l’indemnité kilométrique vélo (IKV) soit non seulement maintenue, mais aussi rendue obligatoire pour toutes les entreprises et administrations. Un amendement en ce sens a été présenté par une dizaine de députés macronistes et défendu par M. Stéphane Buchou. « Cette indemnité vise à réduire la dépendance des ménages à la voiture individuelle et à favoriser le report vers le vélo «  a-t-il notamment plaidé. Le rapporteur s’y étant opposé, au motif qu’il existe déjà « des réductions d’impôt pour les entreprises en faveur du vélo », l’amendement fut retiré pour être discuté lors des Assises de la Mobilité, en clair pour être éventuellement intégré à la Loi des Mobilités.

La Fub et le club des villes cyclables avaient alors regretté ce report, indiquant que l’efficacité de l’IKV était avérée et que les économies induites (en santé notamment) l’emportaient largement sur les dépenses. Ils réclamaient que l’IKV soit déplafonnée et obligatoire.

Prime VAE ou IKV, des efficacités discutables
Dans les deux cas on est dans le symbolique. Il est donc logique que les représentants des personnes ou organismes bénéficiaires s’y attachent.

  • Cependant l’efficacité réelle de la prime à l’achat n’est pas mesurée, et l’expérience montre qu’il s’agit d’un petit coup de pouce sympathique mais symbolique. Pour l’achat d’un vélo deux actions d’aide sont très efficaces : celle des ateliers d’insertion, qui recyclent et revendent à prix très bas des vélos, ou en louent, et celle des vélo-écoles qui apprennent à s’en servir.
    La prime à l’achat d’un VAE peut faciliter la décision d’équipement notamment pour un automobiliste, ce qui naturellement a un intérêt. Il ne s’agit pourtant pas de ceux qui ont le plus besoin d’aide financière stricto-sensu. Cette aide est pour eux un signe plus qu’autre chose, mais ça marche.
  • Pour l’Indemnisation kilométrique son efficacité n’est de même avérée qu’au titre de l’encouragement et de la reconnaissance morale, de l’inscription du vélo parmi les véhicules susceptibles d’être utilisés. Elle correspond à 2 km effectués par jour[1. Sur la réalité du montant de l’IKV, voir l’article L’IKV s’engage à faire pression pour l’amélioration de l’IKV.] ! Je ne nie pas qu’il y ait parfois des aides morales au passage au vélo, mais le doublement des salariés cyclistes n’est avéré nulle part, sauf pendant le « test » mené à l’époque de Ségolène Royal qui hésitait tant. Les entreprises volontaires pour participer à ce test étaient alors toutes des entreprises ayant déjà beaucoup de cyclistes, et ce test n’avait convaincu que ceux qui souhaitaient l’être.

Ainsi, pour l’IKV comme pour l’achat d’un vélo à assistance électrique, on ne fera croire à personne que les sommes en jeu, au moins dans leur montant actuel, aient le moindre effet significatif en tant que tel. En termes d’efficacité globale, pour l’aide à l’achat d’un VAE, on peut penser qu’il vaudrait mieux donner peu aux riches que moyennement aux pauvres.

La Loi des Mobilités devrait avoir une vision plus large
Les Assises de la mobilité devraient plutôt déboucher sur « une transition écologique des mobilités, reposant en particulier sur une trajectoire claire d’évolution des motorisations, une politique renforcée de soutien au vélo ou encore une approche nouvelle des enjeux de logistique urbaine » selon les mots de la ministre lors du conseil des ministres du 20 décembre dernier.

Le vélo n’est qu’une conséquence d’un changement global des pratiques de déplacement et d’urbanisme[1. Dans les réponses à notre questionnaire sur le contenu de la Loi des Mobilités, l’action par les taxes n’avait été proposée que sous celle de taxes foncières ou sur les carburants. Les auteurs avaient préféré l’adaptation des forfaits transports ou des barèmes des indemnités de transport, ainsi que la transformation de la prime au changement de voiture en une prime à l’abandon de la voiture. Assises de la mobilité : que doit contenir la Loi ? Conclusions]. Il n’est un objet premier que pour ses « défenseurs ». Le vélo doit échapper aux cyclistes, ai-je déjà écrit. Espérons que ce sera plus facile que pour l’IKV[1. Sur la difficulté de faire adopter des mesures pro-vélo au Parlement, voir ici l’exemple de l’IKV : IKV : la saga des lois et décrets, de février 2016.] !

A lire aussi :

  • Filière sport, qui parle de … peau de chagrin. Un article très complet, qui indique notamment qu’ une politique cyclable ne se limite pas à ce type de mesure, selon le président de la Fub.
  • Libération : Qui aura droit au nouveau bonus pour l’achat d’un vélo électrique? 3 janvier. Un article beaucoup plus clair que le mien !!!
  • Notre Temps : Vélo électrique: votre commune peut-elle vous offrir une subvention?
  • Le communiqué de la Fub (5 janvier), qui explique que le bonus de 200 € par vélo à assistance électrique (VAE), instauré en février 2017, avait rencontré un grand succès et provoqué un doublement des ventes de VAE. Le budget alloué à cette prime a été divisé par 10 par rapport à 2017 (5 millions pour 2018 contre  50 millions en 2017). La FUB proposait notamment que l’aide nationale soit totalement cumulable avec les aides locales, avec une différenciation du montant par tranche de revenus, tout en conservant un socle universel.
    Elle indique que la portée du nouveau dispositif sera très limitée, puisque les conditions à remplir sont illisibles et très restrictives, et que le montant sera insuffisant pour le public visé. Conditionné au versement complémentaire d’une aide par la collectivité, il risque d’être vécu comme une injustice par les ménages non-imposables ruraux ou péri-urbains, pour qui le VAE serait particulièrement pertinent, mais dont les collectivités n’ont pas les moyens de financer une telle aide.
    Argumentaire complet en PDF et en vidéo.
    Communiqué : CP_FUB_BonusVAE20180105
  • Les explications très claires du ministère dans Bercy-infos : Une prime pour l’achat d’un vélo à assistance électrique. (25 janvier 2018)

—Notes—

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6 années

Au vu du critère de non cumul, l’Etat devrait logiquement débourser 0 euro dans le cadre de ce dispositif. C’est de la saine gestion.

6 années
En réponse à  Isabelle Lesens

Je me suis mal exprimé : dans la mesure où ce cumul est plafonné (et bas de plafond !), le niveau des aides locales fait que l’État n’aura jamais à remettre au pot.

Pascal Petit
6 années

Je ne suis pas convaincu qu’un IKV généralisée, cumulable avec le remboursement transport et plafonnée à au moins le niveau du remboursement transport (disons 35€ par mois en IdF) serait symbolique. 35€ par mois, c’est une somme non négligeable pour pas mal de gens.

Erick
6 années

Les cyclistes se perdent dans des batailles qui ont des effets marginaux sur l’usage du vélo et qui dispersent les faibles financements de l’Etat.
Les enjeux sont dans la rue, sur les routes. Des rues plus paisibles, des aménagements protégeant les cyclistes sur les routes, voilà ce qui décidera nos concitoyens à faire du vélo. Donc c’est là qu’il faut agir et investir. Les gens trouveront ensuite le meilleur vélo dont ils ont besoin et se le paieront.

Hugues
6 années

Cela touche 45% des foyers tout de même. Plus que l’IKV et cette aide à l’achat, c’est la déductibilité des frais de transport qui devraient être limitée. C’est environ 0.35€ du km.
Le barème privilégie les grosses cylindrées; mieux vaut avoir 7cv que 3cv. De plus les 80km maximum théoriques par jour sont souvent dépassés. Dans mon entourage au travail, certains font entre 100 et 130 km par jour pour venir travailler.
La question du vélo et du transport est déjà une question de prix du logement.

MG
6 années

Il ne faut pas négliger les aspects symboliques ! Il y a moult entreprises privées dont la stratégie de communication passe par la publicité « gratuite » via les journalistes et le bouche-à-oreille. Grâce à tous ces reportages aux JT ou ailleurs, on parle Vélib’ et VAE autour d’un café entre collègues. Tous les ans, je dois choisir de cocher ou non la case Vélib’ pour le remboursement de mes frais de trajet. Ça montre que c’est un choix légitime, ce qui est plus important que l’aspect financier (remboursement de 1,55€/mois au nouveau prix). Il faut les deux, des mesures symboliques et des mesures concrètes. Nous partons de très bas, et il faut remonter très vite !

Pascal
6 années

Je serais prêt à mettre mon vieux diesel à la casse si une aide substantielle m’était accordée pour l’achat d’un VAE.

Michel Pepper
6 années

Je ne suis pas favorable à cette prime. Elle procure le même effet que l’Aide Personnalisée au Logement. Elle entraine une hausse des loyers. Depuis quelques années, le prix des VAE augmente sans que l’on note une réelle augmentation de leurs qualités techniques ou autres. On a même inventé des millésimes où seule la couleur change d’une année à l’autre. Je peux citer certains magasins parisiens où l’on vous déconseille absolument d’acheter un VAE avec un prix inférieur à 2 000 €. Est-il réservé aux « Bobos » ?
C’est comme pour le Bio. Il devrait être naturel de produire et consommer Bio. On n’a pas à le subventionner. C’est le non-bio qui devrait être plus cher.

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