Avertir le modérateur

jeudi, 20 décembre 2012

L’auto écolote existe-t-elle ? s’interroge Denis Baupin

autoLe temps s’éloigne où les écolos vitupéraient contre l’automobile. Ce vendredi 14 décembre 2012 à l’Assemblée nationale on a parlé de la rendre plus écologique. Et aussi de s’en passer, mais pas de la condamner. Et même si la journée (1) était placée sous la présidence de Denis Baupin, et avait commencé avec un Yves Cochet en verve présentant une nouvelle étude sur les coûts externes de l’automobile. Paroles entendues et notées. 


La voiture écologique devra être bon marché
Le véhicule populaire propre est possible si on le rend effectivement populaire ; autrement dit, puisque la voiture doit devenir plus écologique, il faut qu’elle devienne moins chère, c’est-à-dire moins sophisitiquée, plus petite et moins lourde. Elle pourrait n'être qu'à une place, et certainement avec moins d'électronique et moins de confort qu'aujourd'hui.  C’est ce qu’a montré Marc Teyssier d’Orfeuil, délégué du club des voitures écologiques. Les industriels français sont engagés dans une course au haut-de-gamme, à la suite des Allemands, et c’est ce qui pourrait les perdre, car ce marché se rétrécit et perd même de sa rentabilité.
L’objectif de voitures plus propres pourrait ne pas s’appliquer qu’aux voitures de luxe. Cela permettrait, notamment, un meilleur renouvellement du parc, et, partant, le maintien de la filière sur le sol français. M. Teyssier d’Orgeuil reprend donc à son compte 2 slogans ministériels récents, l’un sur le véhicule populaire propre et l’autre sur une consommation réduite à 2 litres aux cent. Ecncore faut-il que décision politique il y ait, et qu’elle s’impose également à tous.

Réduire la facture énergétique
Pour réduire emprise et coût, les idées ne manquent pas. Limiter les vitesses autorisées. A 30 km / h, note Denis Baupin, on réduit la consommation de 40%. Limiter les vitesses possibles dès la construction, et cesser d’en faire un argument promotionnel lui-même source de frustration (et d’abus du klaxon), alors que la vitesse moteur possible ne cesse d’augmenter, bien au-delà des vitesses autorisées sur les routes, comme l’a remarqué  le magazine 60 millions de consommateurs. Equiper les moteurs d’un dispositif de coupure lors des arrêts : 30 % d’économie d’un coup dans Paris où 1/3 du temps de conduite consiste à attendre à un feu. Arrêter tout trafic pendant 10 minutes pendant les entrées et sorties des écoles. Faire payer demi-tarif dans les parkings pour les petites voitures, comme le fait Paris. Créer un « disque vert » pour favoriser le stationnement sur voirie des voitures propres. Et de citer encore les voitures sans chauffeur (déjà en Californie) où l’on tiendra salon ou réunion, l’auto-partagée… La non-possession devient un marqueur positif, se réjouit Denis Baupin. Le succès du site covoiturage.fr (devenu blablablacar !), initiative à visée économique, est phénoménal : il augmenterait de 100 000 abonnés par mois !

Cela n’empêche pas de penser report modal, lequel est facilité par les médias qui nous inondent, i-phones et autres écrans.

La voiture des uns est subventionnée par tous les citoyens
Les écologistes qui organisaient cette journée ont fait preuve d’audace. Pourtant Yves Cochet, député écologiste européen, est venu présenter les résultats d’une étude récente (2) qui montre que ces coûts externes représentent 3% du PIB européen.
Les taxes payées par les automobilistes couvrent à peu près les frais de création et entretien du réseau routier. Les coûts « externes » se divisent en 41% pour les accidents (et les pertes de production qui s’en suivent), 37% pour le déréglement climatique et 22% pour la pollution aérienne (baisse de productivité dans l’agriculture, dégradation des bâtiments, etc) et sonore. Les transports sont le seul secteur économique qui augmente encore ses émissions (jusqu’à 30% des émissions de CO2 en Europe), l’industrie les ayant au contraire diminués de 34%.

Oui c'est vous qui subventionnez l’auto du voisin
Pour chaque Européen, automobiliste ou pas, ces coûts s’élèvent à 750 € par an en moyenne (1800 € au Luxembourg, 800 € en France). Dit autrement, chaque automobile reçoit 16 000 € de subvention par an… (ou 5 centimes au kilomètre).
Les embouteillages coûtent à la société française 623 € par foyer, selon une autre étude tout juste reçue, ajoute-t-il.
Roland Dinner, directeur du développement durable de la commune de Sevran, région parisienne, a calculé que l’automobile entrait pour 20%, au bas mot, dans le coût de la rénovation des bâtiments publics : protections de trottoirs, aires de dépose-minute, réseaux enterrés et régulièrement défoncés…
L’auto est une arme de destruction massive de nos enfants, conclue Yves Cochet. Et les constructeurs, qui persistent à fermer les yeux sur les micro-particules, pourraient finir par être poursuivis pour empoisonnement.

Mieux vaudrait réduire le besoin de bouger
Pour Bruno Marzolff, directeur du groupe Chronos, l’auto est un enjeu économique. C’est la mobilité qui est elle-même la question.
Et là, on se heurte au « mur des infrastructures », dont ni collectivité ni individus n’a plus les moyens. Lorsque la politique des transports publics marche bien, c’est même une catastrophe, comme en Suisse récemment : on ne peut pas suivre !  Qui croit encore qu’on a les moyens pour Notre-Dame des Landes, Nantes-Turin ou le Grand Paris express ?
En Ile-de-France, les gens en ont tellement marre de leurs déplacements quotidiens obligés qu’ils renoncent à leurs déplacements de loisir. Certes les déplacements pendulaires ne sont que 25% des déplacements en France, mais 45% des kilomètres parcourus et source de 90% des perturbations. En Ile-de-France, ces distances ont doublé en 10 ans, on habite désormais à 15 km (en moyenne) de son lieu de travail… Alors pour Chronos, tout ce qui est i-travail ou i-commerce est bon à prendre, au lieu de nourrir le cercle pervers du Grand Paris Express.
Pour Stephen Kerckhove, le « bougisme » d’aujourd’hui, au quotidien ou au long de la vie,  produit déracinement et perte de solidarités.
Pour Olivier Razemon, même chose. L’étalement urbain (qui concerne aussi les centres commerciaux notamment) est aussi une question économique (cher à équiper et faire fonctionner), mais surtout un problème social : en zone peu dense, on ne se parle pas, on ne se croise pas. Les centre-villes sont désertifiés partout en France, sauf dans 10 ou 15 villes, selon lui.

et préférer le TGV aux avions et aux autoroutes
Si on ne renforce pas la capacité des LGV Paris-Lyon et Paris-Courtalain (tronc commun de l'axe atlantique) qui sont en voie de saturation, on créra des aéroports et des autoroutes,  dit Jean Sivardière. Pour lui, c’est une erreur que d’être trop catastrophiste, finalement il reste du pétrole. Notamment parce qu’on en consomme moins, parce qu’il y a un peu de nouvelles énergies, parce que les USA en trouvent chez eux et feront donc moins monter les prix, même si ceux-ci continueront à augmenter de 2 à 3 % par an. Ceci dit, ce n’est pas le pétrole qui fait le prix d’une auto, puisque le carburant ne pèse que d’un tiers dans son coût d’usage. Ainsi le report des trafics routier et aérien sur le train n'aura rien d'automatique, d'où l'intérêt de la grande vitesse ferroviaire. Une estimation, pour diminuer l’emprise automobile de 10% il faudrait multiplier par deux les transports en commun. Retour à la case « mur des infrasructures ».

Quant au vélo…--------------------
Geneviève Laferrere devait se demander si le vélo n’était pas le parent pauvre de la mobilité durable. Au contraire, dit-elle, le vélo c’est l’individualité et le temps maîtrisé. Et si c'est un truc de bobo ce ne peut être un truc marginal ! 

 

Quand les écolos parlent de voiture, ils nous entraînent au pragmatisme. C’est sans doute notre intérêt à tous.

 ***

 

(1) Quel avenir pour l’automobile face aux contraintes écologiques et sanitaires ? Assemblée nationale, 14 décembre 2012. Organisé par Agir pour l’environnement, Réseau action climat, et Greenpeace.

(2) Coûts externes de l’automobile, aperçu des estimations existantes dans l’UE à 27. TU Dresden, chaire pour l’écologie du transport, Prof. Dr. Ing. Udo J. Becker et alii. Octobre 2012

(3) Les orateurs :

 

Les commentaires sont fermés.

 
Toute l'info avec 20minutes.fr, l'actualité en temps réel Toute l'info avec 20minutes.fr : l'actualité en temps réel | tout le sport : analyses, résultats et matchs en direct
high-tech | arts & stars : toute l'actu people | l'actu en images | La une des lecteurs : votre blog fait l'actu