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lundi, 04 novembre 2013

Fiscalité et vélo : peut-être une fausse piste

images.jpegIl n’y a pas de fiscalité propre au vélo ou à sa pratique, mais cela pourrait changer car le groupe de travail national sur le vélo a inscrit cette question à son programme. Mais de quoi parle-t-on et est-ce bien une bonne idée ?
Voici l’avis de Mme Amandine Cayol, maître de conférence en Droit privé à l’université de Caen, donné au colloque Droit et vélo, au Havre. Image : http://www.arcoris-patrimoine.fr/impots/


Qu'est-ce que la "fiscalité verte" ?
En France on préfère souvent les outils économiques aux outils normatifs. Ainsi a-t-on choisi de taxer les pollueurs, pour «internaliser» leurs coûts induits (ce qu’ils coûtent à la société), ce qui ne trouble pas les lois du marché. Cela a aussi l’avantage du «double dividende» pour l’Etat : lutter contre la pollution tout en lui assurant des recettes. C’est le principe, tout simple, de la «fiscalité verte», pourtant peu utilisée en France, et de façon incohérente.


Pourrait-on promouvoir le vélo via la fiscalité ?
Plusieurs solutions sont envisageables :

*  La taxation accrue des produits polluants, susceptible d’inciter à les abandonner pour des modes plus avantageux. C’est ce qu’avait institué la loi «pollueur-payeur» de Michel Barnier en 1995. C’est l’écotaxe, assise sur les certificats d’immatriculation (la carte grise, à chaque acquisition), dont le prix est lui-même fonction de la puissance du véhicule. C’est aussi la taxe sur les véhicules polluants (fonction de leur CO2), due uniquement par les entreprises, ou encore la TICPE, taxe sur les carburants.

-> De ce point de vue, nul doute que le vélo est fiscalement intéressant, même si cela n’est écrit nulle part. On peut d’ailleurs encore augmenter ces taxes. 

La suppression des taxes qui incitent à utiliser des véhicules polluants. Mme Cayol cite le barème kilométrique appliqué aux déplacements en automobile des salariés, qui fait baisser la base du calcul de l’impôt sur leur revenu alors qu’aucun avantage comparable n’existe pour l’utilisation d’un vélo.

->  Aujourd’hui, plus le véhicule pollue, plus il fait gagner en réduction d’impôt, puisque la pollution est liée à la puissance. 

L’incitation fiscale à l’achat d’un vélo. Un crédit d’impôt pour l’achat d’un vélo à assistance électrique figure déjà dans les propositions du Plan vélo de janvier 2012. La baisse de la TVA sur les ventes de vélos est une demande récurrente du Club des villes cyclables. Les deux mesures ont pour inconvénient de se traduire par une baisse des revenus de l’Etat.

-> Pour le vélo cela serait probablement peu incitatifestime Mme Cayol, puisqu’on achète déjà, sans incitation, beaucoup de vélos en France (1).

 

D’autres pistes à explorer

  • Elargir le principe du barème kilométrique au vélo, en le rendant même plus intéressant que pour les véhicules à moteur.
  • Créer une indemnité kilométrique pour l’usage du vélo, versée par l’employeur (qui le déduirait de son bénéfice imposable), comme cela est proposé par le même plan vélo de 2012 ainsi que par le plan d’urgence pour la qualité de l’air de février 2013.

 

 

-- Il faut instaurer des mesures fiscales qui encouragent l'usage du vélo, et non son achat, conclue donc Mme Cayol.
Il faut abandonner toute incitation indirecte, et agir directement. (2

*


(1) On achète déjà beaucoup de vélos en France, dont une bonne partie ne sert quasiment pas. Voir les chiffres donnés dans la note sur le réemploi des vélos.

Hans Kremers nous signale aussi l'article In Almost Every European Country, Bikes Are Outselling New Cars (Parallels, 24 octobre), qui montre que dans 23 pays européens sur 27 les ventes d'automobiles sont inférieures en nombre aux ventes de vélos. Exceptions : Belgique et Luxembourg. Chiffres indisponibles : Chypre et Malte. En France, en 2012, 1 899 000 autos vendues, contre 2 835 000 vélos (chiffre encore supérieur à celui donné par l'Heureux cyclage). Repris par Velomaxou qui l'a vu dans Rue89, où c'est écrit en français, et également par Luc Saint-Elie sur son nouveau blog (l'ancien s'appelait Velofun).

(2Parmi les mesures fiscales liées à l'usage, peut-être peut-on mettre les mesures de baisse de TVA en faveur de l'entretien et de la réparation ?

*

Rappel, autres articles tirés du Colloque Droit et vélo, Le Havre, 3 octobre 2013

Commentaires

Cela fait quinze ans que je propose une prime de transport à mes dix salariés pour ceux qui viendraient à vélo régulièrement (20 € mensuels). Même pour 300 mètres ils préfèrent la voiture ! Comme quoi ce n'est pas l'argent qui motive. Quelque soit le prix du vélo on est gagnant financièrement, pas besoin d'avoir une prime fiscale en plus.
Pour l'anecdote jeudi 31 octobre, six heures pour faire Paris - Le Havre en voiture, contre huit heures à vélo...

Écrit par : Ludovic | samedi, 09 novembre 2013

Comme déjà évoqué dans l'article du 13 novembre 2012, même si les mesures fiscales ne développent pas le vélo à elles seules, il serait quand même bien de corriger la distorsion de TVA entre les transports publics (qui va passer de 7 à 10%) et les services vélo (qui va passer de 19,6% à 20%). Ces 10 points d'écart ne s'expliquent pas dans l'objectif d'une mobilité plus durable.

Écrit par : Tristan | mardi, 12 novembre 2013

Parmi toutes ces hausses de taxes, stagnations de salaires, abaissements de plafonds fiscaux, chasse aux niches fiscales, ce gouvernement pourrait en profiter pour enfin accorder aux cyclistes ce qui est accordé aux automobilistes : une indemnisation kilométrique des trajets domicile-travail contribuant à l'entretien et au renouvellement du vélo.
Il n'est pas sûr qu'un raz de marée cycliste déferlerait (cf le commentaire de Ludovic) mais si cette reconnaissance officielle pouvait être un déclencheur de prises de conscience individuelles ...
Car c'est effectivement un comble de voir que c'est le moyen de déplacement le plus polluant, le plus coûteux pour la société et le plus encombrant qui est subventionné.
Or désormais 82% des Français vit dans les villes, où le déplacement à vélo est - sauf exception - la solution la plus efficace pour les déplacements individuels de quelques km, qui restent majoritaires.

Écrit par : Jean-Jacques | dimanche, 17 novembre 2013

Les subventions attribuées aux vélos en libre-service : entre 2000 et 2500 €/an/vélo. Pourquoi ne pas financer à même hauteur les ateliers de vélo, en fonction de leur nombre d'adhérents ?

Écrit par : Theron | mercredi, 20 novembre 2013

Les commentaires sont fermés.

 
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