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mardi, 10 janvier 2012

De palmarès en palmarès : et alors ?

politique cyclable,kremersDe palmarès en palmarès, méthodes et résultats. Encourager, ou permettre d'assouvir sa rancoeur ? Ce mois-ci Hans Kremers fait un tour dans ces événements médiatiques que sont les remises de prix à des communes, et s'interroge sur leur efficacité.

A l'occasion de la remise du prix à Den Bosch, un tour dans les prix et palmarès qui ne marchent pas, puis présentation de deux bons exemples. En France et en Europe.



> COMMENT METTRE EN AVANT LES BONNES VÉLOVILLES ? <

La notion du palmarès existe depuis longtemps pour plein de domaines, y compris évidemment pour les efforts des villes en matière de politique vélo. La méthode de fabrication des palmarès varie selon les pays. (image : Trophée du vélo, France)

Des prix comme des cadeaux
un petit tour dans les prix pas efficaces

-- Le palmarès allemand se base entièrement sur une grande enquête menée grâce aux cyclistes, invités à faire part de leur perception. Cette enquête était réalisée tous les deux ans conjointement par l'ADFC (qui regroupe les cyclistes au quotidien et les cyclotouristes) et le BUND (section allemande des Amis de la Terre) en partenariat avec le Ministère Fédéral de l'Environnement.
La dernière de ces enquêtes, qui a eu lieu en 2005, a vu le retour de ... 26 000 questionnaires comportant 22 questions dans lesquelles on demandait de noter 22 critères selon une grille allant de 1 (très bon) à 6 (mauvais)... Impressionnant, voire ... Monstrueux !
Cette méga-enquête s'est traduite par le classement de 142 villes allemandes en trois catégories : villes de moins de 100 000 habitants, villes entre 100 000 et 200 000 habitants, villes de plus de 200 000 habitants.

-- L’assemblée générale de la FUB (Fédération française des Usagers de la Bicyclette) décerne depuis la fin des années 90  à une collectivité le « Guidon d’or » pour récompenser des réalisations ou initiatives exemplaires et le « Clou rouillé » pour épingler ce qu’il ne faut pas faire. Cependant les « candidats » sont désignés par les associations membres et la décision se fait en une seule réunion.

-- Les trophées du vélo sont organisés par le Comité de Promotion du Vélo, créé en 2001, qui rassemble de nombreux acteurs du vélo en France. Ce concours intéressant est ouvert entre autres aux collectivités locales. Il ne s’agit cependant pas d’un palmarès consacré à l’intégralité de la politique cyclable puisque les candidats sont invités à concourir sur un thème particulier de leur politique.

-- Copenhagenize a sorti récemment son Palmarès mondial des « bicycle-friendly cities ». C’est avec sa propre sauce de 13 critères que cette  agence de communication danoise constitue le top 20 des meilleures villes cyclables en 2011.

-- Cette approche avait déjà vu le jour en France, dès 1990 (!!!). 50 Millions de consommateurs avait en effet publié le premier Palmarès des villes cyclables, sous la plume d’Isabelle, qui à cette époque ne savait pas encore ce qu’est un blog … mais avait fait des visites approfondies de toutes les villes citées. En 1993 elle avait recommencé pour le même journal, avec un questionnaire adressé aux 22 capitales régionales et aux associations de cyclistes locales. Et en 1994 elle avait encore monté un concours, les Contrats Vélo pour la Ville, au sein du ministère de l’Environnement, avec un jury qui avait retenu 10 dossiers sur une soixantaine de candidats.

-- L’importante enquête menée par la Club des Villes et Territoires cyclables auprès des villes dans le cadre de son Observatoire des mobilités actives, mérite d’être signalée. Toutefois, l’objectif  de cette démarche, initiée en 2008 par le CVTC et la FUB, n’est pas d’aboutir à un palmarès. En effet l’Observatoire « vise à offrir un panorama complet, et régulièrement mise à jour, des indicateurs susceptibles d’évaluer les politiques en faveur des modes actifs et de leurs usages dans les villes françaises ».


Tout ça tombe du ciel, et ne dure pas

Le point commun entre les palmarès évoqués ci-dessus est que leurs résultats tombent un jour du ciel (à l’exception des trophées du vélo dont les dates sont connues). Cet effet de surprise peut marquer à court terme, mais l’on peut s’interroger sur leur impact réel à long terme (*).

Si je pose cette question c’est aussi pour attirer l’attention vers d’autres types de palmarès, très participatifs, qui font durer le plaisir et qui assurent des résultats dans la durée.

*

UN PETIT TOUR DANS DES PRIX EFFICACES
En voici deux, aux Pays-Bas et en Belgique.

* Aux Pays-Bas les usagers décernent un prix pour la gloire
et les candidatures affluent !

politique cyclable,kremersLe « Fietsersbond » (qui est l’équivalent de la FUB, Fédération des Usagers de la Bicyclette, en France) organise depuis 2000 l’élection de LA Véloville des Pays-Bas. Il s’agit d’après le « Fietsersbond » d’une élection positive qui vise la mise en évidence des points forts des communes et la communication des bons exemples.

Au fil des années, cette action est devenue un véritable événement conforté par une attention médiatique importante. La ville lauréate ne reçoit pas d’autre récompense que le titre, dont les retombées sont cependant considérables. En effet, d’une part, la période qui précède cette récompense est marquée par une volonté de positiver au sujet de la politique vélo de la ville et, d’autre part, l’impact positif du prix est l’attention nationale et internationale dont la ville est l’objet pendant une, voire plusieurs années.

Une organisation en deux temps forts

Pendant les trois premières éditions c’est la qualité générale du « bicyclimat » des communes candidates qui avait été comparée (politique vélo, itinéraires cyclables structurants desservant les équipements, part modale du vélo, risques d’accident …). Ce critère de la qualité générale a été complété pour l’élection de  2011 par un thème spécifique : « Sur le chemin de l’école ».

Le Fietsersbond a fait un appel aux candidatures au mois d’avril 2011. Dix huit communes ont déposé un dossier de motivation et ont renseigné un questionnaire pour ce titre très convoité, décerné peu importe le nombre d'habitants des communes. Après la clôture des inscriptions, mi-juin, l’élection s’est déroulée en deux étapes :

(1)      Le choix des finalistes

Le bureau national du Fietsersbond et ses sections locales dans les villes candidates ont examiné les dossiers en tenant également compte des critères formulés par des enfants. Le Fietsersbond a annoncé au mois d’août la nomination des cinq villes sélectionnées pour pouvoir prétendre au titre. Elles ont reçu chacune un petit film promotionnel (tous visibles ici, et très intéressants ...) pour leurs aménagements et actions. Ces films sont réalisés par le Fietsersbond.

(2)    Le choix du lauréat par un jury indépendant

Le choix de La Véloville de l’année 2011 a ensuite été confié à un jury indépendant composé de personnes venant d’horizons différents : le directeur de l’organisme national qui chapeaute les services communaux chargés de la santé des citoyens, le directeur de l’organisme national chargé de l’enseignement public, la rédactrice en chef d’une revue spécialisée dans la circulation, la responsable du service Mobilité régionale du ministère de l’Infrastructure et de l’Environnement, un urbaniste de l’université de Delft ainsi que deux enfants.

Ce jury a effectué une visite dans les cinq communes nominées et son choix a été annoncé début novembre par la ministre de l’Infrastructure et de l’Environnement. La ville lauréate de cette élection est ‘s-Hertogenbosch (appelé aussi Den Bosch) Elle peut désormais utiliser le logo « Fietsstad 2011 » (Véloville 2011) ... mais cela ne lui a pas suffit pour obtenir Velo-city.

politique cyclable,kremersVoici quelques raisons de ce choix, évoquées par le jury :
La commune a encouragé fortement la pratique du vélo de manière créative et avec un budget notable. Le réseau cyclable a été fortement amélioré. Les abords des écoles ont été adaptés de façon innovante. Les parkings pour vélos sont gratuits. Le vélo bénéficie d’une approche transversale dans l’aménagement de la ville. Il y a une bonne communication pour la promotion du vélo.

politique cyclable,kremers


* En Belgique on ROULera à la carott

politique cyclable,kremersLa ministre flamande de la Mobilité et des Travaux Publics a créé en 2011 une élection pour des nouveaux prix afin de récompenser les efforts en matière de politique cyclable des collectivités locales. Il y a trois catégories : les communes de plus de 50000 habitants, les communes entre 50000 et 20000 habitants et celles de moins de 20000 habitants.

La meilleure commune cyclable sera élue en 2012 dans chacune de ces catégories. Les communes lauréates recevront un prix d’au maximum 50 000 euros qui devra être utilisé pour des mesures permettant de renforcer la politique cyclable.

Cette nouvelle initiative a eu un grand succès puisque 71 communes flamandes ont présenté leur candidature.

En décembre 2011 c’est un jury indépendant de dix personnes qui a nominé 18 communes, soit six par catégorie. Un bureau indépendant est maintenant chargé des visites du terrain afin de préparer le choix du jury des communes gagnantes. Le résultat de cette élection sera annoncé par la ministre en juin 2012. En attendant, les communes nominées ont le droit d’utiliser le logo (illustration).

 

*

* En conclusion ...
La vélocratie participative donne les vélouanges les plus désirables

Les distinctions ou palmarès élaborés de manière unilatérale peuvent plaire aux bons élèves, qui utiliseront sûrement ces titres  Par contre, les autres élèves, et notamment les derniers de la classe, se vexeront, pour ensuite vite passer à autre chose. Bref ...  entre les 142 villes allemandes ou les quelques villes françaises, qui va se souvenir des lauréats ? Vous ?

La méthode des Néerlandais et des Belges flamands présente quelques avantages par rapport aux démarches unilatérales, y compris l'allemande. En effet, leur approche de vélocratie participative laisse à toutes les communes le choix de l’implication. Elle permet ensuite, pendant environ six mois, entre l’inscription et l’élection, un débat animé aux niveaux national et local  autour du thème du vélo. Après l’élection c’est l’esprit de compétition positive entre les communes non retenues qui fera le reste : elles vont essayer de faire encore mieux pour décrocher les vélouanges la prochaine fois.


Hans Kremers

*

Sources :

http://www.fietsersbond.nl
http://www.nieuwsblad.be
http://www.fietsberaad.nl
http://verkeerskunde.be/nl
http://www.villes-cyclables.org
http://www.lievreoutortue.com
http://omondouvelo.com
http://www.adfc.de
http://www.tousavelo.com/Trophees-du-Velo-2010/0320.html


 

politique cyclable,kremers

 

(*) L’effet du 1er Palmarès, en 1990, fut sans doute un peu plus fort que les autres, grâce au rôle de l'attachée de presse et aussi, peut-être, car il tombait à une époque de désert médiatique et politique sur le vélo, mais avec déjà des aspirations palpables de la part des citoyens. En tous cas Strasbourg, sacrée alors  première, exploita ce titre pendant de très nombreuses années …

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