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mardi, 21 juin 2011

Les "coupures" dans le milieu urbain

coupure !.jpgLa ville morcelée

- Qu’en est-il des feux vus par les cyclistes ? - Peut-on mesurer l’impact des obstacles sur la pratique des modes actifs ? - Quels effets la hiérarchisation des voies a-t-elle sur la vie quotidienne des enfants et des personnes fatiguées ? - Et sur la motorisation de la société ... ?

Qu’est-ce qu’une «coupure urbaine» et quels critères permettent d’en apprécier la gravité ? Quels remèdes leur apporter ?

-Présentation du livre de Frédéric Héran : "La ville morcelée, effets de coupure en milieu urbain".- --------------------------- ---------- ------


Frédéric Héran nous présente ici une somme sur un sujet sur lequel il a beaucoup travaillé, celui des « coupures urbaines ». Loin de se limiter aux coupures visibles sur un plan (voies express, ferrées, d'eau...), il montre le rôle que jouent les obstacles, et notamment les obstacles artificiels que sont feux et sens interdits. Les conséquences des politiques de voirie et de circulation sortent largement de leur domaine propre (la gestion du trafic), et touchent à la paix sociale et à la santé publique…
Quelques notes de lecture, qui n'épuisent certainement pas la richesse de l’ouvrage.

 

Le livre présente d’abord ce que sont les coupures. Lignes infranchissables, bien sûr, telles que fleuves, voies ferrées, autoroutes, mais aussi feux et détours comme usines ou cimetières. Ces coupures sont encore plus pénalisantes pour les cyclistes que pour les piétons, car les aménagements cyclables sont encore plus rares que les trottoirs et parce que les cyclistes, allant plus loin, rencontrent des obstacles plus nombreux. On peut calculer ce que cela représente en allongement théorique de parcours.

auto-génération.jpg

 

A Paris, un feu rouge tous les 150 mètres.
La qualification de coupure n’est pas simple. L’auteur montre que la RN 8, à Neuilly, qu’on voudrait couvrir, ne fonctionne pas comme une coupure, bien qu’elle soit la plus chargée de France. Le chapitre 8 est consacré à ce cas.
En revanche, de nombreux quartiers péri-urbains sont totalement séparés du monde, ce qui participe à la montée de la violence.
Alors qu’on s’échine à maintenir ou à créer des continuités « écologiques » pour les animaux et même les plantes, un tel souci est absent pour les humains. Pour eux on se contente de dépenser des sommes astronomiques pour lutter contre le bruit, mais rien d’autre.
Le type de maillage provoque des taux de détours différents, le pire étant le lotissement péri-urbain et ses impasses multiples. Le plan haussmanien ainsi que le plan moyennâgeux sont très bien, au contraire.

Délais, détours, dénivellés, allongent les parcours, et réclament plus d’énergie, au démarrage ou dans les côtes. « A Paris, les carrefours à feux sont situés en moyenne tous les 150 mètres (record mondial). On comprend mieux pourquoi les cyclistes considèrent si souvent les stops et les feux rouges comme des cédez-le-passage. » (p. 37). En outre leurs « ondes » sont réglées sur des vitesses que ne peut atteindre un cycliste.(*)

Fig. 21 : L'autogénération des coupures.

 

Les coupures ont des conséquences sur toutes4 impacts.jpg les caractéristiques de la vie sociale
Pourtant les conséquences des coupures urbaines sont plus que bruit et accidents, elles sont altération des relations de voisinage, découragement de l’usage des modes actifs, ségrégation spatiale, accompagnement rendu obligatoire, sentiment de relégation, recours excessif aux modes de « transport », éducation des piétons à se garder du trafic, interdiction de jouer, perte d’autonomie des enfants, réclusion des « PMR », dispersion de la population … Le vélo, découragé, a fini par sortir de l’imaginaire collectif, ce qui explique son difficile renouveau. Il a perdu toute crédibilité.

Tableau 12 : Les quatre impacts indirects majeurs communs à l'ensemble des nuisances en milieu urbain.

 

La vitesse rapproche le lointain, mais éloigne le proche
Aucun remède partiel (mur anti-bruit, passerelle, etc ) ne résout la question ; il risque même d’avoir des effets pervers. Mieux vaudrait s’attaquer à la cause, qui est, finalement, la recherche de la vitesse.

Alors que vitesse et distance sont équivalents pour le véhicule motorisé, seules les distances comptent pour ceux qui ne peuvent pas augmenter leur vitesse. Ils prennent donc de plein fouet les augmentations de distance. Ne pas oublier non plus que la vitesse est source de profits pour les industriels, de l'automobile, des transports publics, des BTP (p. 109).

Cela remonte à loin : On apprend que la mise à sens unique des Grands boulevards, à Paris, a été faite en août 1951 (p. 94). C’est en avril 1971 que l’Etat a commencé à distribuer des subventions pour la réalisation des plans de circulation, c’est-à-dire des sens uniques, c’est-à-dire encore de la ségrégation de trafics. De facto, la hiérarchisation du réseau exclue les cyclistes de la ville. Seul remède, la modération des vitesses.

 

Les infrastructures incriminées « séparent le proche pour relier le distant ». Il serait temps de renoncer à la vitesse, et donc à la distance !

 

---Frédéric Héran, La ville morcelée : effets de coupure en milieu urbain---
----------Ed. Economica, avril 2011. – 25 €----------

 

Ou :  Comment on a fait pour détruire la pratique du vélo ... car c'est finalement ça que vous apprendrez en lisant le livre...

(*) J'ajoute que l'on comprend mieux aussi l'intérêt des bandes d'accès aux feux, ou la nuisance que produisent les automobilistes qui empêchent les cyclistes d'atteindre la ligne d'effet des feux. Ils les empêchent de bénéficier du temps de traversée, et de la totalité du cycle.

Commentaires

Les coupures ? Sur mon quotidien : flemme de traverser la route car longue attente, détours passages piétons ou impossibilité de traverser en-dehors des feux... donc flemme d'acheter du pain ou d'aller dans les petits commerces... Plus facile de "commander" par Internet et de contribuer aussi à des camionnettes sur la route...
Les coupures ? 30mn à pied au lieu de 15mn à vol d'oiseau à pied car une voie rapide en plein milieu.

La "grande vitesse" semble une illusion : nous allons très vite en effet entre deux points... mais "de porte à porte" on ne va pas aussi vite que ça !!! Je vois des embouteillages monstres de plus sur ces "voies rapides". Elles n'ont de rapide que leur nom, et je pense que la rapidité devient de plus en plus illusion !!!

Écrit par : Miss "Paris change" | mardi, 28 juin 2011

Les commentaires sont fermés.

 
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