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vendredi, 30 septembre 2011

Sophie sans ses béquilles (l'article)

Sophie s'intéresse !.jpgSophie est Parisienne et fréquente le forum Velotaf. Tout comme Isabelle. C’est suite à la présentation de son vélo par Sophie qu’elles se sont rencontrées. Si le vélo vaut qu’on en fasse le tour, la fille encore plus …

Le vélo rend joyeux, même avec des maladies terribles ...  

 

Cet article devait paraître dans le numéro de septembre 2011 de Alternative santé, mais la revue a cessé sa parution à ce moment-là. Les lecteurs de Isabelle-et-le-vélo en ont donc l'exclusivité.


 

-- En 1979, j’ai 16 ans. Le 3 novembre, je prends un bain de mer, comme nous le faisions presque toute l’année. Le lendemain j’avais une angine. Un mois plus tard c’est un  rhumatisme articulaire aigü : 6 mois allongée et un an de traitements lourds sans scolarité.

Tout se calme, et je mène à bout scolarité et études de journalisme. A l’été 86, j’ai 23 ans, je suis en stage à La Roche-sur-Yon. Et là, terrible. Je suis réveillée toutes les nuits par des douleurs atroces. Mon torse est pris comme dans un étau, mes hanches se bloquent, je deviens d’une lenteur incroyable. J’ai une spondylarthirte ankylosante…

Tout ça pour vous dire que la douleur, je connais. Et qu’on n’y peut pas grand’chose. Ni aux poussées, qui me prennent des mois entiers de ma vie.

Alors, soit on vit avec, soit on disparaît. Soit on l’accepte, soit elle vous coule.

La spondylarthirte ankylosante, c’est une maladie de la douleur - intolérable, que nul ne peut comprendre - mais aussi une maladie de la mobilité. Et en plus cela ne se voit pas.

Mais ce n’est pas tout, car, à cause ou non d’un de mes traitements, j’ai aussi eu deux cancers du sein. Un à chaque, et différents, en plus !

Mais à la fin de ma chimio, devinez ce que m’ont offert mes amis... un vélo !

 

-- C’est à partir de ce moment-là que la maladie a vraiment fait Sophie décroche son vélo.jpgpartie de ma vie. Tous les matins, pendant que je me dérouille et me débloque, je me réjouis de l’après-midi qui vient. Car je vais aller à vélo !

Avant le cancer, j’avais déjà intégré la maladie. A cause des crises, notamment, j’avais décidé de ne pas être salariée (ç’aurait été mentir à un patron), et avant chaque changement de traitement, je me débrouillais pour partir en reportage : 3 mois en Egypte, 2 mois en Israël, en Pologne… avec morphine et béquilles.

Situations ubuesques de blocages soudains, ni théâtre ni cinéma (impossible de tenir assise deux heures d’affilée ), vie sociale et amoureuse compliquée (on ne peut plus même m’effleurer après 4 h de sommeil)… J’ai appris à gérer.

Mais pour la douleur, il n’y a que les grands moyens, qui valent ce qu’ils valent… Et le vélo.

Sur mon vélo, je n’ai plus mal précisément là où j’ai besoin de ne pas avoir mal : sous les pieds et aux mains : c’est lui qui me porte. Sur mon vélo, ce n’est plus 20 minutes pour traverser la rue, c’est 20 minutes pour traverser la ville.

 

Et sans lui, sincèrement, je serais déjà morte.

Car non seulement il m’a redonné la notion du plaisir, et donc le goût de la vie, mais en plus il est devenu pour moi un instrument incomparable de mobilité, et finalement aussi un outil de santé, et de mesure de ma forme. Alors j’y vais.

Trois heures minimum chaque jour, désormais, souvent tard le soir quand Paris est plus calme. J’ai mes itinéraires, je connais les parcours sans feux. En période de crise, c’est mon vélo classique de dame, position droite pour être sûre de pouvoir tourner la tête. En période de forme, c’est Tobek, un superbe vélo « historique » que m’a vendu un vieux monsieur. Et lorsque mon fils était petit, nous avions un vélo danois avec une caisse devant.

Le vélo, la canne suspendue au guidon, et zou ! maman est une championne de vitesse !

Le vélo oblige à bien se connaître, il aide à se réapproprier son corps, sans nier la maladie. Il ne l’annule pas, mais il en freine l’évolution. Il me permet de me déplacer.

 

-- Et il me fait prendre la vie du bon côté. Il m’a fait rencontrer un tas de gens passionnés, des fous de fixie, des dingues de beaux vélos, des urbains, des grands voyageurs, des indépendants et des plan-plan, santédes prolos et des aristos … toute une bande de gens joyeux et qui pètent la forme !

J’ai l’air triste ? Non madame, j’ai une maladie, mais je ne « suis » pas malade. Non mais !

 

Entrevue, rédaction et photos : Isabelle Lesens

 

Commentaires

Bravo, je pense pouvoir dire, au nom des membres du forum vélotaf.com qui la connaissent, qu'on retrouve bien là, et redécouvre, "notre" Sophie.

Écrit par : Jean-Jacques | lundi, 03 octobre 2011

Bravo !!! Très beau témoignage. C'est tout de même incroyable de constater qu'il faut croiser des personnes aussi exceptionnelles que Sophie pour retrouver cette évidence : IL Y A DU PLAISIR A FAIRE DU VELO !!!
Et ça nous redonne le goût de la vie à ceux qui l'avaient perdu.

Écrit par : Hervé | mardi, 04 octobre 2011

Quoi dire de plus sur cette thérapie de vie? Bien portant au regard de ce qu'endure Sophie, j'avoue que lorsque je ne me sens pas bien, une virée a vélo me requinque ! Donc Respect la miss !

Écrit par : Lydr2Douai | mardi, 04 octobre 2011

Superbe article !
Superbe portrait!
Sophie, comme j'aimerais que mes patients tout aussi malades, mais d'autres tristes maladies, prennent la vie comme toi !

Écrit par : Béatrice | mardi, 04 octobre 2011

Ce petit mot pour te remercier, Isabelle, pour ce portrait qui remet bien les choses en place... Quelle belle leçon de vie! J'en suis "baba"... Bel exemple de vélosophie.

Écrit par : Michel Heffe | mercredi, 05 octobre 2011

C'est épatant ce que raconte Sophie. Chapeau. Je voudrais humblement ajouter un témoignage.
Bien que beaucoup moins handicapé que Sophie, j'ai beaucoup de mal à marcher suite à un vieil accident. En revanche, je peux pédaler. J'ai mon vélo pliant, un Dahon acheté à Velo-city 2009 à Bruxelles, et j'ai trouvé une canne pliante en titane (très légère, Sophie je te la conseille, car attention à la canne au guidon, ça m'a valu un beau gadin !). Je la plie quand je prend le vélo et alors, libéré de la pesanteur, je confirme que ce n'est que du bonheur. Ceux qui me côtoient connaissent mon expression: " A vélo, je jouis". Je ne parle pas de jouissance sexuelle mais je jouis de redevenir normal, de dépasser les voitures, d'être libéré de la pesanteur, de me sentir léger. J'en parlais à la journée d'études de Rue de l'Avenir le 23 sept à Berne: il faut insister sur cette fonction thérapeutique du vélo (pour ceux qui peuvent pédaler bien sûr). Le vélo est une aide pour un grand nombre de PMR. En plus, en vacances, le vélo me permet à nouveau d'accompagner ma famille qui regrettait mon absence lors des visites et promenades à pied.
Le vélo, c'est magique, n'est-ce pas Sophie ? Je t'embrasse et te souhaite bon courage. Yan

Écrit par : Le Gal Yan | samedi, 08 octobre 2011

Les commentaires sont fermés.

 
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