IKV fonction publique : grave…

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img-070-01Datée du 24 octobre 2016 mais applicable au 1er septembre (2016), la circulaire de mode d’emploi de l’IKV secteur public fait 11 pages.
>>> Je vous la résume en 3 points, et vous donne des nouvelles (tristounettes) de la mise en place de l’IKV au ministère des Affaires étrangères et à l’ADEME. 

Datée du 24 octobre 2016 mais applicable au 1er septembre (2016), la circulaire de mode d’emploi de l’IKV secteur public fait suite à l’article 50 de la loi du 17 août 2015 sur la transition énergétique, elle-même suivie du décret du 31 août 2016 instituant l’IKV spéciale expérimentale au ministère de l’Environnement, dont elle n’est qu’une circulaire d’application qui arrive deux mois après et qui ne semble pas lui être réservée.
Tout ça n’est pas rapide, et pas ambitieux du tout, comme vous allez voir.
>>> Je vous la résume en 3 points, puis vous donnerai des nouvelles de la mise en place de l’IKV au ministère des Affaires étrangères et à l’ADEME.

1- Contenu de la circulaire sur la mise en place de l’IKV du secteur public

(1) Des avantages du vélo tu ne profiteras pas


  • On ne profite pas d’avoir un vélo pour rentrer déjeuner à la maison (1.3). Tu peux, mais ça ne compte pas dans l’indemnité (dont le plafond de toutes façons est déjà atteint. Préviens quand même, des fois qu’ils compliquent tout le jour où tu as un pépin).
  • On ne profite pas d’avoir un vélo pour aller au boulot avec quand il fait grand beau. Si tu tiens à être payé pour aller à vélo, ce sera tout le temps (II-1), si tu lis mal l’explication, ou au moins les 3/4 du temps (IV), si tu lis mieux, mais le reste est à tes frais. Ne t’avises pas non plus de dire « vélo » et de venir à pied la plupart du temps, tu serais un horrible profiteur directement dirigé vers le poste de police. De toutes façons, tu choisis vélo ou TC comme indemnisation, sauf si c’est du rabattement (ouf!), mais voir la suite :
  • On ne profite pas d’avoir un vélo pour remonter la ligne et s’assurer une place assise (II-1), ni pour se rabattre plus loin, là où il y a un bon garage à vélos et plus de trains. Ceci dit, vous auriez bien tort de ne pas le faire, c’est juste votre indemnité qui ne suivra pas (bien que le plafond soit sûrement déjà atteint), et les problèmes qui commenceront sérieusement en cas d’accident (s’il est grave).

(2) Frauder tu ne pourras pas

  • Pas de cumul avec la voiture de fonction qui aurait pu t’attendre au garage pour le jour où tu dois aller loin.
  • Pas de cumul avec le transport public, tu peux pas adapter aux circonstances, faut savoir ce qu’on veut.
  • Pas de cumul non plus avec les vélos en libre-service, ce qui est idiot puisque tu peux habiter en lointaine banlieue et travailler au centre-ville. Y préfèrent sans doute que tu fasses transiter ton vélo par le train (bondé) ?
  • Pas le droit de bouder le car de la boîte au bénéfice du vélo, et pas le droit de tenter le vélo si t’es handicapé. 
Tout ça c’est dans II.2.
  • Et dans III-1 on précise, pour être bien sûr que tu ne vas pas voler le patron, que c’est bien toujours toi qui t’assure et te débrouille si t’as un accident. Ce qui est idiot car puisque l’IKV est pour aller au boulot, si t’as un accident c’est accident du travail.

(3) Les agents de l’Etat n’ont pas à se faire du fric sur le dos du contribuable

  • Pour les agents de l’Etat l’IKV est plafonnée à 200 € par an, ou 16,66 € par mois, même si votre chèfe aurait voulu offrir un petit bonus (même imposable) parce qu’elle sait que ça ferait bien pour l’image du ministère. 
Faudrait pas que l’IKV secteur public soit meilleure que chez les sous-traitants (déjà qu’ils vous piquent le boulot …).
  • Il y a un tableau qui prend 2 pages (les 5 et 6) pour expliquer comment calculer le montant finalement dû en fonction de tous les paramètres. Ca coûtera plus de temps à calculer que ce que ça rapportera au citoyen…
  • Pour les gens qui ont plusieurs lieux de travail, il faudra qu’ils remplissent … autant de formulaires de demande d’IKV que de lieux de boulot.
  • Pour ceux qui arrêtent en cours de mois, ça ferait trop de boulot de tout recalculer (sans doute), donc l’indemnisation va jusqu’à la fin du mois (V.2). Ce qui fait qu’au moment de « poser vos jours » pensez bien à partir en cours de mois. Grattez un peu, c’est pas de la fraude !
  • Et puisqu’il s’agit d’une « expérimentation », vous n’aurez rien avant d’avoir répondu à un questionnaire. C’est le cerema qui est chargé d’évaluer1 Lors de l’émission de Tout un rayon, Sylvie Banoun précise que c’est le suivi effectué par le cerema qui permettra peut-être de péréniser l’IKV-service public..

La circulaire est ici : note-de-gestion-ikv-fonction-publique

2- Les résultats auxquels on peut s’attendre

  • Le résultat, c’est que peu d’organismes vont la mettre en place, car peu d’agents sont susceptibles d’y avoir un intérêt (ou un intérêt supérieur à sa complication). Là-dessus j’aimerais bien avoir tort, car quelque chose me dit que dans le secteur hospitalier et dans les transports, ne serait-ce que pour des raisons de localisation et d’horaires, le nombre de gens intéressés pourrait être bien plus important (mais demandez aussi un bon garage à vélos, et des pistes cyclables…).
  • 
Dans les organismes mi-privés – mi-publics, c’est encore plus compliqué car les agents relevant du privé peuvent être dotés plus « généreusement », même si c’est alors soumis à l’impôt. Mais une telle usine à gaz, pour le responsable du service des ressources humaines comme pour l’agent, va là aussi faire renoncer à sa mise en place.
  • On peut en effet s’attendre à ce que peu d’agents renoncent au remboursement du TC, d’un montant toujours supérieur, ce qui ne les empêche pas de venir à vélo et de garder leur abonnement aux transports publics pour les jours de grand froid et pour partir en WE. A voir dans le détail des montants, et si ils ne contrôlent pas trop. Car c’est de la triche, hein !
  • Seuls pourraient être intéressés à coup sûr les gens en rabattement ou ceux qui ne prennent pas les transports publics.

3- Prudence (pruderie ?) dans l’application

  • 
Au ministère des Affaires étrangères, malgré la demande exprimée par la CFDT, la direction se retranche derrière la fin de l’expérimentation chez le voisin (le ministère de l’Environnement), alors que rien ne l’y oblige. Je dirais même plus, l’expérimentation est ouverte à tous les organismes du secteur public, la preuve la note d’explication vient d’être signée ! Il n’est écrit nulle part que Ségolène Royal se réserve l’exclusivité, il est juste probable que le Premier ministre devrait signer un décret, comme il l’avait fait pour l’IKV-fonction publique-ministère de l’Environnement. Ce qui nous trouble c’est que le ministère de l’Environnement n’ait pas attendu la note de cadrage, qui concerne tout le monde dans le public, pour prendre sa décision. C’est tout.
  • Quant à l’ADEME, qui est de droit privé et avait piloté les expérimentations initiales, elle traînait la patte mais vient de se décider, sans enthousiasme. Elle offre 200 € annuels maximum, sans plus, ne prend en compte que un aller-et-retour par jour mais s’engage à avoir un accompagnement (stationnement, mécano, kit d’éclairage, gilet et propagande) une fois par an. Sont exclus de cette IKV les gens qui bénéficient déjà d’une aide (de 50%) pour la location-vente d’un vélo (aide maximum 1200 €), et ceux à qui on rembourse une part de l’abonnement aux TC ou aux vélos en libre-service, sauf rabattement. Bref, c’est l’application a minima de cette nouvelle possibilité d’encourager l’usage du vélo dans les déplacements liés au travail. Les syndicats auraient voulu bien mieux (plafond de 500 € par an, comme lors de l’expérimentation, dont les 200 non imposables) mais ont quand même signé car c’était ça ou rien. Ce sera mis en oeuvre à partir du 1er octobre, il est donc trop tôt pour parler de résultat. Notons quand même que le trajet « le plus court » est bien un trajet donné par un calculateur d’itinéraire à vélo, et non par la première autoroute du coin (§ 4, Modalités de mise en oeuvre) et que l’on ne trouve pas trace de l’obligation de faire au moins les 3/4 des trajets à vélo, ni d’autres restrictions contre-productives et quasi-vexatoires  imposées au secteur public un mois après.

Accord IKV à l’ADEME : accord_ikv-ademe

  • On vient d’apprendre qu’une concertation allait être lancée avec les collectivités territoriales intéressées par la mise en place d’une indemnité kilométrique vélo.
  • Pour les ministères de l’Environnement et du Logement, je ne sais pas où en est la mise en place de l’IKV.

4- Les solutions pour encourager l’utilisation du vélo

Si votre patron veut encourager les agents à venir à vélo, il pourrait aussi faire preuve de pragmatisme, et d’efficacité garantie.

  • Si vous connaissez le ministre des Affaires étrangères, dites-lui qu’il peut rétablir le garage à vélos de l’Imprimerie nationale2 Le ministère des Affaires étrangères est aujourd’hui installé dans les bâtiments appartenant auparavant à l’Imprimerie Nationale. L’abri à vélos courait sur toute la façade, entre les deux escaliers. De mon temps (fin des années 80) il n’était presque plus utilisé., il peut faire venir de temps en temps un mécano, il peut installer un local avec de l’éclairage, un pied de réparation, quelques outils et même une bonne pompe, avec un cabinet de toilettes muni d’un robinet d’eau et de savon …
  • Après il peut même organiser des concours, conseiller, etc. mais ça devient sans doute trop volontariste, là. Il pourrait même miser sur la joie au travail, mais bon, là c’est sûrement trop.
  • Votre chef peut aussi ne pas faire comme le ministère des Affaires étrangères, qui croit bien faire en ayant … 5 … vélos de service, bardés d’obligations : se couvrir d’un moche gilet réfléchissant et de scratchs dans les collants, venir avec son propre casque (prétendu réglementaire, donc « fortement recommandé »), tenter de remettre le vélo là où on l’a pris, etc. A ce compte-là, autant aller à pied. Ou en métro (car l’essentiel du ministère des Affaires étrangères est à Paris !).
  • Quant à vous, salariés et syndicalistes du public, réclamez l’expérimentation de l’IKV chez vous !

impr_nationale-face

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Finalement, l’IKV fonctionne mieux dans les entreprises « sales » …

7 années

Il fallait bien une base de calcul pour l’IKV, mais la notion de distance « la plus courte » prise en compte pour l’IKV montre aussi que les usages sont mal connus. Beaucoup de cyclistes préfèrent faire un trajet plus long mais plus sécurisé, avec moins de voitures.

Héléne
7 années
En réponse à  Anne G

Avec moins de voitures, et moins de feux ainsi que moins de pentes. Sur ce dernier point, exemple des villes en promontoire comme Angoulême ou Poitiers, où les cyclistes ont tout intéret à passer par la route bien plus longue mais à pente plus facile que par la route directe qui fonce devant.

Gilles
7 années

Je ne partage pas ton optimisme sur le coté généraliste de cette note.
Elle est faite par les ministères dans le champ de l’expérimentation et quand elle parle des personnels concernés (fonctionnaires etc.) la note rappelle bien les personnels concernés inscrits dans le périmètre de l’expérimentation (notamment les personnels payés sur le programme 217 de la LOLF)
Les agents des autres ministères peuvent toujours le demander, mais à partir du moment où ce n’est pas prévu par la loi, le comptable public refusera de le payer.

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