Assises de la mobilité : Que doit contenir la Loi ? F. Papon

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2 principes et 6 mesures pour préserver la santé publique, le développement durable et la cohésion sociale Francis Papon

Affirmer deux principes de base

Une nouvelle loi sur la mobilité doit affirmer certains principes, au delà du droit au transport et du libre choix du mode de transport créés par la LOTI.

  Le droit de se déplacer avec un mode actif, dans la sécurité, le confort et le respect.
 L’objectif de développer les mobilités actives pour préserver la santé publique, le développement durable et la cohésion sociale.

 

Décider des mesures entraînant action

1 – Abaisser les vitesses autorisées

Abaissement de la vitesse maximum autorisée en agglomération à 30 km/h.
Possibilité de laisser certaines voies à 50 voire 70, si et seulement si équipées d’aménagements pour les cyclistes et les piétons.

Abaissement de la vitesse maximum autorisée hors agglomération à 70 km/h.
Possibilité de laisser certaines voies à 90 voire 110, si et seulement si équipées d’aménagements pour les cyclistes et les piétons.

Ces simples mesures ont pour effet de limiter les risques d’accidents et de favoriser l’usage des modes actifs.

2 – Inciter les collectivités territoriales à développer les mobilités durables

Modulation de la dotation de l’État en fonction des résultats observés en termes de mobilité durable ; prise en compte notamment de l’évolution de la part modale de la voiture solo, et de la satisfaction des piétons et des cyclistes (qui peut être mesurée par le baromètre proposé par la Fub).

3 – Création d’un fonds national pour les mobilités actives

Afin de réserver des ressources pour les infrastructures piétonnes et cyclables, création d’un fonds national pour les mobilités actives, comme proposé par la Fub, qui pourrait être en pourcentage du budget routier.

4 – Création de forfaits transports dans les entreprises

– Obligation du remboursement par les employeurs aux salariés d’un forfait transport unique (éventuellement modulé selon les régions). Il se substituera au remboursement de la moitié de l’abonnement TC, et à l’indemnité kilométrique vélo des cyclistes. Il s’appliquera à tous, depuis ceux qui viennent en mode actif, jusqu’à ceux qui viennent en voiture.
– Obligation pour l’employeur de facturer le stationnement des voitures à ses salariés.
– Remplacement du barème des frais kilométriques dans la déclaration de revenus par un forfait kilométrique indépendant du moyen de transport utilisé.

Cet ensemble de dispositions auront plusieurs effets positifs :

Il incitera les salariés à habiter plus près de leur lieu de travail, ce qui aura pour effet secondaire, notamment, de rendre plus pertinent l’usage d’un mode actif.
Il mettra fin au barème de remboursement des frais de déplacement, qui favorise l’usage de la voiture et de voitures de forte puissance.
Il rendra la gestion de ces remboursements beaucoup plus simple.

5 – Modification de l’assise de la taxe foncière

Création d’une taxe sur les constructions nouvelles
Cette mesure peut également prendre la forme d’une modulation de la taxe foncière en fonction du lieu de construction.

Il s’agit ici de favoriser la proximité, et donc les modes actifs. Pour cela il faut favoriser le renouvellement urbain au détriment de l’étalement urbain, et favoriser les sites bien desservis par les transports collectifs.

6 –  Introduction de la notion d’impact sur la santé dans les politiques menées

– Lancement de campagnes de communication sur les avantages pour la santé des modes actifs, encore trop peu perçus par la population.
Obligation d’évaluation des impacts sur la santé de tous les projets de transport et de toutes les politiques de transport.

Cela favorisera les modes actifs, car la santé est le critère le plus à même de convaincre.

 

Francis Papon, ICPEF, HDR
Directeur du laboratoire Dynamiques Économiques et Sociales des Transports (DEST)
Département Aménagement, Mobilités et Environnement (AME)
Institut Français des Sciences et Technologies des Transports, de l’Aménagement et des Réseaux (IFSTTAR)
Animateur du GERI vélo.

Dans la série Que doit contenir la LOM ?
Introduction 27 octobre 2017
F. Héran 30 octobre 2017 Instaurer des plans de traitement des coupures
B. Beroud 31 octobre 2017 Affirmer la nocivité de l’automobile et en tirer les conséquences
J. Demade 2 novembre 2017 Déterminer sa logique en fonction des distances à parcourir
A. Guggenheim 3 novembre 2017 Les trois premiers articles de la Loi !
J.L. Saladin 6 novembre 2017 Appliquer aux transports le principe de subsidiarité
Is. Lesens 7 novembre 2017 S’assurer de l’adéquation des règles et aménagements aux besoins des cyclistes
F. Papon 9 novembre 2017 2 principes et 6 mesures pour préserver la santé publique, le développement durable et la cohésion sociale
F. Luciano 10 novembre 2017 Hiérarchiser les modes en fonction de leurs impacts et orienter les usages par le biais des taxes
Conclusions 12 novembre 2017

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Bardet, Marie
6 années

Cet ensemble de dispositions aura plusieurs effets positifs, notamment il incitera les salariés à habiter plus près de leur lieu de travail. Je pense que ce n’est pas par plaisir que les salariés se tapent des heures de transport, beaucoup rêveraient d’être à 2 pas de leur boulot … Mais entre le prix des loyers, la précarité des emplois, les contraintes quand on est deux à travailler, les études des enfants … le choix du lieu d’habitation n’est pas si simple.

6 années

Il faut faire attention avec ces assises, car vu de l’extérieur, elles ressemblent à un catalogue de khmers. J’en veux pour preuve la taxe sur les constructions neuves. Croyons-nous qu’on va se faire des amis avec des propositions comme celle-là? Il faut songer à rester en adéquation avec les conditions de mobilité de la France entière et pas seulement celle des grandes agglomérations.
Dans le Haut-Rhin, habiter à quarante km de son travail est souvent la seule alternative et il n’y a que la voiture pour se transporter. Cas de nombreux travailleurs frontaliers.

Lucien
6 années
En réponse à  Tissot

Je suis un peu de cet avis, lorsque je vois apparaître toutes ces bonnes intentions des uns et des autres, j’ai bien peur qu’elles s’autodétruiront entre elles.
L’homme a eu un jour « la bonne idée » de vouloir aller toujours plus vite et plus loin. Il me semble qu’il n’a nullement envie de freiner le mouvement.

BikePower
6 années
En réponse à  Tissot

Certaines personnes ont besoin d’une voiture pour aller travailler, cependant :
a) l’énergie pétrolière quasi gratuite va bientôt tirer sa révérence, il faut donc activement préparer son déclin
b) si celles et ceux qui peuvent assez facilement se déplacer à vélo le faisaient et faisaient pression pour faire évoluer les infrastructures, la situation pourrait évoluer très vite
c) la voiture électrique n’est PAS la panacée
d) la technologie pour des voitures légères à 1 ou 2L/100km est disponible, il faut y aller sans attendre
e) avec de bonnes infrastructures cyclables et les vélos électriques, il est tout à fait envisageable de travailler dans un rayon de 15 km de chez soi
Si tout le monde contribue, c’est facilement faisable en quelques années, c’est juste une question de volonté…

Bardet, Marie
6 années

Tant qu’il n y aura pas de pistes cyclables dignes de ce nom, et tant que les transports en communs seront mal pensés et peu fiables, les gens prendront leur voiture, taxes ou pas taxes.
J’habite dans Toulouse, ma fille va en classe prépa dans Toulouse, elle a le choix entre :
* 1h de bus (2 bus consécutifs) dans des conditions inconfortables (debout et serrés) le matin la même chose le soir, soit 2 h de trajet/jour;
* 30 min de vélo non securisés (double voie rapide, rond point, axes chargés) soit 1h en tout;
* 15 min de voiture matin et soir.
A votre avis elle utilise quoi ?

BikePower
6 années
En réponse à  Bardet, Marie

Dans ce cas, c’est réellement l’infrastructure cyclable qui pose problème, car le trajet doit être d’environ 7 km : avec une bonne infrastructure et un vélo électrique ça doit pouvoir se faire en 20 minutes, avec en prime une séance de gym quotidienne gratuite !

6 années

Abaisser les vitesses autorisées ? Autre idée (© Philippe Bihouix) : à partir du 1er janvier 20xx, interdiction d’immatriculer une voiture de plus d’une tonne. L’année suivante, 980kg. etc. On va vite arriver à la voiture à 1 litre/100km.

BikePower
6 années
En réponse à  Vincent

C’est une piste sur laquelle la France devrait déjà bosser, car il y a une place à prendre ! Il va y avoir du boulot pour déconditionner les automobilistes du confort de leur appartement sur roue… mais ça peut constituer un sevrage en douceur vers le vélo ! En tout cas il y a des économies à faire sur l’import de produits pétroliers et une réduction des GES et particules fines. Ce ne sont pas les solutions qui manquent, c’est la volonté !

Fabien
6 années
En réponse à  Vincent

Le poids des véhicules est directement lié à la vitesse autorisée (quasi similaire à la vitesse de fonctionnement) et à la sécurité demandée pour les occupants (les véhicules rapides et légers des années 80 faisaient énormément de morts). Donc diminuer les vitesse maxima et réglementer les poids des véhicules aura le même effet, sauf qu’il est plus simple et plus adapté à tous les véhicules de réglementer la vitesse à la baisse.

Adrien
6 années

Au sujet de la vitesse : En milieu urbain, il est clair qu’abaisser la vitesse générale à 30 ne peut être que bénéfique (avec des exceptions à 50 quand c’est justifié et bien aménagé pour les cyclistes, voire 70 sur des voies vraiment séparées, en traitant l’effet de coupure).
En revanche, en milieu rural, abaisser la vitesse de 90 à 70 n’a aucun intérêt concret pour les cyclistes. L’abaissement de la vitesse ne devient sécurisant qu’en dessous de 50.
En milieu rural si on y abaissait la vitesse à 70, cela n’apporterait rien aux cyclistes, un dépassement frôlant à 70 ou à 90 fait le même effet ! Je préfèrerais qu’on mette des moyens pour sanctionner les dépassements frôlants, ou qu’on invente une nouvelle règle qui dit qu’on ne dépasse pas un cycliste à plus de 50 ou 60, en plus de laisser 1m50 d’écart.

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