Le Conseil d’orientation des infrastructures affirme l’importance du vélo

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Ainsi que nous nous y attendions, le rapport du comité d’orientation des infrastructures, remis ce matin à Elisabeth Borne, reconnaît une place importante aux mobilités actives. Le vélo est cité dans près de la moitié des pages (94 sur 214).

On ne sait pas quel scénario sera retenu, d’ailleurs ils ne diffèrent guère que par la vitesse d’engagement des dépenses.

Le mot d’ordre du rapport établi sous la présidence de Philippe Duron et remis ce matin à Elisabeth Borne pourrait être de réfléchir à partir des besoins, mettant fin à l’ère des annonces grandioses sans savoir qui paiera. On pensera davantage ligne nouvelle que TGV. Avec plus de 500 auditions pendant 4 mois de travail, cela fera date, a félicité Elisabeth Borne, qui se dit en accord avec les conclusions du comité. Ce rapport est le dernier des Assises de la mobilité à être rendu, et avait été le premier à être mis en chantier. Il s’agit ici de recommandations, pas encore de décisions.

Les trois scénarios comportent tous les mêmes rubriques :

L’entretien et la modernisation des réseaux. L’état de nos routes est déplorable, les chemins de fer se bloquent. Le plus urgent est de remettre à plat l’utilisation des lignes sur le domaines des gares. A Saint-Lazare cela n’a pas été fait depuis 1933! 30% des déplacements de train sont internes au faisceau marseillais ! Cela est un préalable à toute extension du réseau.

La lutte contre la pollution et la congestion en ville. Cela passe par la question des noeuds ferroviaires et des pôles multimodaux, et aussi par le vélo et autres mobilités actives. Un rôle important est aussi accordé à la régulation des accès et des vitesses, à la lutte contre l’usage des autos par une seule personne, au développement des services de partage ou location de véhicules.
« En milieu urbain, l’augmentation de capacité et la création de voies nouvelles n’est que rarement un remède pertinent à la saturation.»
« La marche, le vélo et les autres mobilités actives sont encore les parents pauvres des politiques publiques », indique encore le rapport. Cela concerne « en milieu urbain et périurbain, les équipements nécessaires à la régulation du trafic, aux itinéraires piétons et vélo, à leur qualité et à leur continuité, à l’organisation (parkings, aires d’arrêts) et à la circulation prioritaire (voies réservées) des transports collectifs et partagés ».

Le désenclavement des villes moyennes et territoires ruraux, certaines rocades sont indispensables.
Le fret.

La France doit rester à la pointe de l’innovation, pour garder notre avance et parce que ça a du sens. Deux exemples, la propulsion de trains par l’hydrogène va être testée, et cela vaut donc la peine de décaler dans le temps certaines électrifications. Les voies ferrées ne doivent pas disparaître mais servir, de voies vertes, bien sûr, mais aussi de support à véhicules autonomes pour des liaisons commodes là où la demande est clairsemée, ou à d’autres fins à voir.

La transition énergétique doit être prise au sérieux, a indiqué M. Duron. Etant donné que 80% des déplacements se font sur route et que cela ne va pas changer du jour au lendemain, il va falloir décarboner (par exemple passer à l’électrique). La neutralité carbone doit être atteinte en 2050, rappelle le rapport.

400 millions en 5 ans pour le vélo
Le rapport propose dans son scénario 3 que 400 millions d’euros en 5 ans soient dédiés à la mobilité active, puis 50 millions par an. Le scénario n° 2 (350 millions, plus qu’en Allemagne, rapporté au nombre d’habitants, indique le député Matthieu Orphelin) permettrait d’en couvrir 90%.

Pour le vélo les financements devraient être choisis sur appel à projets, si l’idée est retenue, donc après promulgation de la loi. Les voies vertes ne sauraient y figurer (elles relèvent du tourisme) mais les voies vertes en tant que traversées d’agglomération et de lien entre bourgs et ville, oui, car alors elles servent aussi de liaison pour les affaires ordinaires.

« Le scénario « équilibré » (n° 2) du rapport, avec un budget de 350 millions d’euros sur 4 ans pour les mobilités actives, est cependant en deçà des propositions des associations (Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB) et Club des villes et territoires cyclables) qui, toutes deux auditionnées par le comité d’orientation, ont estimé les besoins à 200 millions d’euros par an.» expliquent-elles dans un communiqué commun. « La France ne rattrapera pas son retard sans que l’Etat ne participe à l’effort qui est demandé aux collectivités territoriales » rappelle la Fub. Elle veut un vrai Plan vélo pour créer « un système vélo complet et cohérent, apportant des réponses à tous les enjeux : lutte contre le vol, fiscalité, éducation à la mobilité citoyenne. Ce nouveau système vélo ne fonctionnera donc correctement que si un soin particulier est apporté à la gouvernance, qui intègrera tous les acteurs – y compris la société civile – et englobera ainsi tous les enjeux. » Rappelons qu’un Plan vélo est en effet prévu et devrait être rendu public à peu près en même temps que le texte de la proposition de loi.

MOBILITÉS DU QUOTIDIEN : Répondre aux urgences et préparer l’avenir. Conseil d’orientation des infrastructures. Janvier 2018.

On peut remarquer que, enfin, le vélo n’est pas un sujet « à part », un problème, une source de difficultés, mais bien une solution moderne s’insérant parmi d’autres. C’est à mon avis l’avancée la plus importante. Le « moment historique » approche, écrivais-je il y a quelques jours. Le Grand basculement, si vous préférez. En revanche la marche à pied n’est que peu explorée.
Le fait que l’on envisage de recourir à des appels à projet ne me paraît pas le meilleur moyen pour tirer les projets vers le haut, et l’on peut regretter, finalement, que le vélo ne soit pas pris en compte par l’Agence de financement des infrastructures. Cela n’empêcherait pas de définir des critères ou des orientations telles que la résorption des coupures ou les liaisons inter-communales. Le « fonds vélo » demandé par la Fub pourrait alors servir à une politique coordonnée et ambitieuse hors infrastructures. Ce n’est qu’une proposition personnelle.

 

  • La Loi sera présentée au Conseil des ministres en avril avant d’être soumise au parlement.
  • Dès la semaine prochaine la ministre recevra l’ensemble des présidents de région, des grandes associations de collectivités, les représentants d’usagers et les ONG, pour recueillir leurs réactions sur ce rapport et leurs propositions. Le Gouvernement fera ensuite connaître son choix concernant le scénario retenu qui constituera la base du volet programmation et financement des infrastructures du projet de loi d’orientation des mobilités.
  • Ce rapport, issu d’une large écoute, présente une vision ambitieuse, globale et pragmatique, avec laquelle la Ministre est en résonance. La concertation qui va suivre devrait permettre d’arriver à une proposition de loi largement acceptée d’avance. Du beau boulot.
  • Le rapport est téléchargeable depuis le site du club des villes cyclables (pour élus et professionnels territoriaux) et sur celui de la Fub (citoyens et associations).

 

Liste des participants :
Bruno Cavagné, Jean-Michel Charpin, Gérard Cornu, Michel Dagbert, Karima Delli, Philippe Duron, François Durovray, Nicolas Forray, Hervé Maurey, Louis Nègre, Michel Neugnot, Matthieu Orphelin, François Philizot, Barbara Pompili, Pierre-Alain Roche et Benoit Simian.
Sous la présidence de Philippe Duron.
Rapporteurs : Mélanie Mégraud et Dominique Ritz. Rapporteur général : Pierre-Alain Roche.

 

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Hervé
6 années

Merci pour cet article, et pour vos prises de position avec lesquelles je suis en phase.
Si je peux me permettre une correction de forme : le pluriel de « scénario » est « scénarios » et non « scénarii » :
« Ni le pluriel italien archaïque scenarii (ancienne orthographe), ni sa variante francisée scénarii (avec accent aigu) ne sont d’usage courant : le pluriel scénarios est le plus commun en français. Selon l’Académie française, en effet, le mot scénario étant français (en italien, il n’aurait pas d’accent aigu), le pluriel « scénarios » s’impose – exactement comme pour lavabos ou pianos. Quand un mot d’origine étrangère est intégré à la langue française, il cesse d’être soumis aux règles grammaticales de son pays d’origine pour être soumis aux règles grammaticales françaises (rapport du Conseil supérieur de la langue française publié dans les documents administratifs du Journal officiel du 6 décembre 1990). » source : Wikipedia – C’est vrai qu’on imagine mal dire « des lavabi » ou « des piani » 😉

Regis Reguigne
6 années

Le rapport Duron = quelques centaines de millions d’euros pour le vélo en 5 ans. Certes, mais cela n’a de valeur que s’il y a un programme précis, un Plan National Vélo concret et applicable, puis appliqué, même pas évoqué dans ce fameux rapport, un plan détaillé dis-je, et pas seulement quelques chiffres en l’air (?).
Or, dans ce contexte, le député Matthieu Orphelin n’a qu’une seule proposition, revaloriser et élargir les dotations rétribuées pour les parcours effectués à vélo domicile – travail. Un plan vélo cela ? Je lui ai adressé un message pour lui proposer des pistes de réflexion, pour une véritable politique cyclable nationale. J’espère travailler le sujet avec lui. Pour mémoire, lorsque j’ai proposé « une Loire à vélo », dès 1993, élu au conseil régional du Centre, il m’a fallu 2 ans d’insistance pour faire accepter et voter mon projet, avec, dans la foulée, l’acceptation aussi de mon itinéraire par nos voisins des Pays de la Loire. Conclusion : ESPOIR.

Alexandre
6 années
En réponse à  Regis Reguigne

Une autre question reste sans réponse : qui va s’occuper de tous ces crédits ?
A ma connaissance, en administration centrale du ministère de la transition écologique et solidaire, il doit y avoir trois personnes qui travaillent sur le sujet, la coordinatrice interministérielle, son chargé de mission et une personne à la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer. Or, même si une grande partie de l’argent est versée aux collectivités, cela suppose tout de même de rédiger un cahier des charges, analyser les projets et proposer des montants de subvention. Ces projets devront aussi être suivis, faire l’objet de conventions … Ne serait-ce que 150 ou 200 M€ sur cinq ans représentent des dizaines de projets chaque année.
Par ailleurs, en services déconcentrés, le nombre de personnes travaillant sur le sujet est généralement situé entre 0 et 1… Même dans un organisme comme le CEREMA, il doit y avoir à peine une dizaine de personnes sur le sujet (et qui ont pourtant largement contribué à inspirer, proposer et diffuser de nouveaux usages et outils).
C’est très bien de faire un plan vélo mais il faut voir comment cela va se traduire dans l’administration. On verra donc si la ministre (qui semble convaincue) arrive à transmettre son engagement dans les services et à faire en sorte que le vélo soit enfin considéré comme un moyen de transport comme les autres.

Réguigne
6 années

Un Plan National Vélo clair, concret, sur des axes forts, et non des dossiers déposés en ordre dispersé du chacun pour soi, n’est-ce pas risqué? Une fois définies clairement les politiques d’aménagement en faveur des déplacements à vélo les collectivités locales devront agir, et rendre des comptes. Chaque Région ne devrait-elle pas écrire son Plan Vélo en harmonie avec le Plan National ? Ensuite les déclinaisons locales seront plus souples et efficaces. La répartition des fonds serait alors de la responsabilité des Régions.

Coveliers
5 années

Le budget vélo de la Flandre est de plus de 100 millions € par an. Ce qui permet de financer beaucoup de tunnels et de passerelles vélos pour les véloroutes rapides (snelweg). La Flandre, ce sont 65 millions d’habitants. Cela veut dire un coût de 15 € par an et par habitant pour la politique cyclable. La FUB demande la création d’un fonds national vélo, doté d’au moins 200 millions € par an. C’est à dire 3 € par an et par habitant, donc 5 fois moins.

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