Deux livres qui veulent libérer l’écologie des partis politiques

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Deux livres récents montrent les énormes bourdes qu’ont engendré des conceptions mal ajustées. L’écologie n’est pas la propriété de la gauche, ni des écologistes, disent Olivier Blond comme Brice Lalonde. Après avoir lu leurs livres vous ne verrez plus les écolos comme avant, et distinguerez les personnes des partis.

Le livre d’Olivier Blond n’est pas tendre avec les écolos. Il montre que certains n’ont à peu près aucun résultat, préférant se contempler en train de pérorer. L’auteur préfère l’écologie du résultat à celle des moyens, le pragmatisme au baratin, les actes aux préjugés.

Olivier Blond base sa démonstration sur le fait que la plupart des écolos s’affichent de gauche, d’autant plus de gauche qu’ils se sont alliés à elle et y gagnent de quoi vivre, souligne-t-il.

Olivier Blond, ancien directeur de l’association Respire (et professeur de santé environnementale, proche de Arthus-Bertrand, etc), est désormais aussi conseiller régional d’Ile-de-France et travaille auprès de sa présidente, candidate à la Présidence de la République. C’est un impliqué qui veut faire en sorte que la réalité change pour de vrai, au bon niveau.

L’auteur de Plaidoyer pour une écologie … de droite se réjouit de la proximité de la Droite avec le monde des entreprises, car c’est là que les choses se jouent. Il donne quelques exemples d’entreprises vertueuses que vous n’imaginez sans doute pas. Il plaide par exemple pour qu’on n’empêche pas « les » voitures de rentrer dans Paris mais qu’on fasse en sorte que les flottes de services deviennent propres. Il ne veut pas prendre la défense des thons rouges mais des pêcheurs, et donc de leurs ressources. L’écologie de droite ce sera transformer l’offre plutôt que de culpabiliser le consommateur.

Il rappelle que Sarkozy et Borloo ont créé le Grenelle de l’Environnement, et cite d’autres grands noms, comme certains écologistes qui ont fui, Bennahmias ou Wehrling parmi d’autres.

Pour lui l’écologie est un moyen au service de la population, laquelle ne peut adhérer que si elle y voit son intérêt immédiat. Il veut passer du négatif (à bas la bagnole) au positif (j’ai un intérêt personnel à utiliser le vélo).

Il y a plus dans ce livre, car il souligne que l’écologie est désormais urbaine, comme la population. L’écologiste d’aujourd’hui bien souvent ne sait pas distinguer un liseron d’un volubilis, une marguerite d’un souci, un chardon d’un artichaut. 

C’est la chance de la Droite, dit-il, tout en ne lui pardonnant pas de s’en tenir à ses vieilles rengaines sur la propreté et la sécurité. Elle devrait au contraire profiter de sa proximité avec le monde de la production pour changer le monde. Ne laissons pas la planète à des gauchistes ou à des illuminés…  plaide-t-il encore.

Olivier Blond. Plaidoyer pour une écologie … de droite. Albin Michel, mars 2022. 16 €

Brice Lalonde, dans son livre Excusez-moi de vous déranger, dit lui aussi qu’il faut cibler correctement les actions. 

Son livre, par ailleurs plus détaillé que celui de Blond sur l’histoire de l’écologie en France, dont il a été un acteur de premier plan, montre que l’écologie a été kidnappée par les Verts, et les Verts par le monde associatif. En fait, selon lui, ils ont le même virus, celui du désespoir, et ce qui leur a manqué c’est d’avoir une stratégie.

Lui aussi cite de grands entrepreneurs, et insiste pour qu’on comprenne que le principal problème qui se profile, c’est l’eau, en trop ou en pas assez selon les cas. 

Pour lui « le cartel des climato-malavisés est puissant » et il en donne la preuve. « La fermeture de Fessenheim a conduit au maintien de la centrale au charbon de Cordemais », comment un tel égarement est-il possible s’interroge-t-il ailleurs. De même la rénovation du bâtiment a pour effet de mieux consommer l’énergie plutôt que de diminuer les émissions de CO2. 

Il démêle aussi les imbrications politiques avec le pétrole, et les horreurs dont nous avons été complices, au Moyen-Orient comme ailleurs, avec pour résultat une situation bien pire encore. Il met en garde les écolos français contre leur naïveté qui ne fait que renforcer des pouvoirs toxiques. Les écologistes sont victimes de leurs préjugés, assène-t-il.

Préserver un climat hospitalier pour prospérer, c’est la tâche des peuples. Ce n’est pas une affaire d’écologie mais une priorité de l’espèce humaine toute entière, explique-t-il. Son livre s’adresse au candidat écologiste à la Présidentielle pour faire entrevoir l’extrême complexité de l’affaire. Il lui dit que les promesses réjouissent, les lois dessinent un bel horizon, et les règlements vont en sens contraire, car ce sont les groupes de pression qui tiennent la plume… Résultat on n’a pas encore vu de bonne politique écologiste, à son avis. 

Brice Lalonde fut ministre de l’Environnement et ambassadeur des négociations internationales sur le climat. Il avait commencé aux Amis de la Terre et était proche de René Dumont. Je l’ai toujours vu à vélo. 

Brice Lalonde, Excusez-moi de vous déranger, éd de l’Aube, février 2022. 20 €

Finalement je vous recommande de faire mieux que moi. Non seulement lire ces deux livres, mais les relire et les annoter. Vous comprendrez peut-être alors ce que veut dire Pragmatisme et Accompagnement, et apprécierez les actions à leurs résultats plus qu’à leur conformité à des dogmes. La vie est complexe. Prenons les gens comme ils sont et cherchons les bons alliés. 

Il faudra également lire le livre de Stéphane Lavignotte, pasteur et militant écologiste, qui tente de montrer les racines bibliques de l’écocide en cours… L’écologie, champ de bataille théologique. Éd Textuel, Coll Petite encyclopédie critique. À paraître en mai.
Il rappelle que l’Homme a été chargé de mettre de l’ordre dans le chaos de la Terre, mais parle aussi de la résistance aux logiques techniciennes de grands penseurs chrétiens du 20eme siècle. Pour lui le monde se ferme, par sa passion de la technique, au lieu de s’ouvrir au « Tout-Autre ». La Bible pose les limites que l’homme ne doit pas dépasser, et dans les Eglises chrétiennes il y a un tas de jeunes réactionnaires et aussi un pape progressiste qui publia Laudate si. 
Ce livre sera une mine pour comprendre comment nos idées et nos religions ont façonné notre rapport au monde. 

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marmotte27
1 année

Pour chaque livre prônant une écologie de droite il y en a cent qui expliquent que c’est les idéologies de droite qui nous empêchent d’avancer dans ce domaine.

1 année

C’est une thèse intéressante. L’écologie de droite devrait réconcilier beaucoup de ceux qui militent pour un certain ordre des choses, dont celui de la nature. On ne peut effectivement que s’interroger sur le côté confiscatoire de l’écologie moderne. On en voit aujourd’hui le résultat par le très faible score obtenu par les uns et les autres qui s’en réclament. Enfin les élections sont faites pour un temps, n’en parlons plus, je n’ai jamais fait confiance à l’écologie pour défendre le vélo ni à droite, ni à gauche.

Adrien
1 année

Je trouve ça intéressant, car j’aime bien ce qui sort des sentiers battus et des idées répandues.
▶️ Sur la question de savoir si l’écologie doit être de droite ou de gauche, il faut quand même rappeler qu’une société basée sur la consommation de ressources ne peut qu’aboutirqu’à l’épuisement de toutes les ressources donc à sa propre disparition.
Donc a priori, capitalisme et écologie sont difficilement compatibles.
▶️ D’un autre côté, dans un monde résolument capitaliste, je ne suis pas étonné qu’on obtienne de meilleurs résultats pour l’environnement avec des gens de droite qui s’adressent aux entreprises (et aux gens qui détiennent le pouvoir) plutôt qu’avec des militants qui voudraient les faire évoluer plus radicalement mais n’arrivent pas à les toucher.
⏩ Et puis parfois, dans la réalité, tout se mélange un peu. Par exemple, on voit des élu-e-s EELV soutenir les ZFE sans se soucier de leur fort et injuste impact social, alors qu’à la base c’est une idée de droite qui vise surtout à renouveler le parc automobile sous un prétexte d’amélioration de la qualité de l’air. Ces élus se soucient pas non plus du fait que cette amélioration de la qualité de l’air est faible et qu’elle est accompagnée d’effets pervers (légitimisation de la voiture en ville dès lors que sa vignette lui permet de « se sentir propre », entretien financier d’un système automobile qui mériterait de disparaître, effacement d’autres solutions qui pourraient être plus efficaces pour réduire l’usage et la pollution de l’automobile en ville…).

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