jeudi, 08 août 2013
J'ai testé le Paris-Londres : seconde et dernière partie
Orienter les cyclistes à travers la campagne est plus facile qu'en ville. Le besoin absolu d'infrastructures dédiées y est aussi moins fort.
Heureusement, car sur cette seconde partie de l'itinéraire bien peu a été fait.
"Paris – Londres - Jeux olympiques" est un itinéraire facile à vendre.
Même s'il n'y a pas grand'chose à vendre.
Ajout du 18 septembre : le récit en photos et commentaires du parcours de Paris à Londres par Adrien Caillot.
Ce fut une très mauvaise idée que de prendre un train jusqu'à Pontoise. D'abord je n'ai pas réussi à sortir de la gare. L'ascenseur fonctionnait, m'a-t-on affirmé malgré mes tentatives, et surtout après que j'aie gravi une à une toutes les marches de la passerelle avec mon vélo plein de sacoches. La porte donnant sur la sortie était verrouillée, l'appel de secours n'a jamais rien provoqué.
Finalement j'aperçois deux agents, je les hèle d'en haut, ils me disent que pour le cadenas ce n'est pas eux et que si personne ne m'a vue c'est que la gare est grande... Ils ont hissé vélo et bagages par dessus les tourniquets. Il m'aura fallu une demi-heure pour qu'on me vienne en aide.
Ceci n'était que le début. J'ai aussi mis deux heures et demi à aller de Pontoise à Cergy-le-Haut (dans le quartier de … les Hauts-de-Cergy, merci pour les non-francophones), sans trouver l'itinéraire indiqué sur le guide, en suivant un sentier à peine visible en bord de rivière et des jalonnements souvent anté-diluviens, incomplets et non-suivis. Le dernier, place de la gare, était neuf, mais dans mon dos. Je maintiens donc que vous pourriez prendre un train jusqu'à Nanterre-ville, ou bien jusqu'à Cergy-le-haut. Les traversées des zones urbaines sont, comme d'habitude, le gros point noir. (Sauf pour les villes moyennes si l'on évite le centre commerçant, ce que l'itinéraire fera plusieurs fois en Normandie...)
Eure et Seine-maritime : enfin on roule
Après des panneaux bien placés, mais indiquant Paris, et quelques jurons de ma part parce que ça commençait à vraiment m'énerver, je suis sortie d'Île-de-France à peu près en même temps que de la zone urbanisée. Les deux vont peut-être ensemble, en tout cas ça allait mieux. C'est triste à dire, mais à chaque fois qu'on entre dans la région-capitale, la situation s'agrave brutalement pour le vélo. (Pour rappel : sur cet itinéraire, le département des Yvelines se distingue nettement, en bien !).
Sur cette route après Cergy, le fléchage n'est pas plus systématique qu'avant, mais l'horizon est plus dégagé et il est plus facile à concevoir. De plus les autocollants italiens le complètent chaque fois que nécessaire depuis Paris. En 4 jours, en campagne, je ne me suis trompée qu'une seule fois. Mais le guide reste indispensable, malgré ses lacunes par endroits.
Tiens, ce sont les autocollants de l'agence
qui cherchait tant son chemin l'autre jour !!!
Ce qui est sûr, c'est que pas un centime n'a été dépensé en infrastructure. Une voie verte est prévue, entre Neuf-marché et Forges-les-Eaux (et même plus) parallèlement à la voie de chemin de fer, mais pas avant 2017, les achats des bandes de terrain manquantes se faisant au forceps. A ce moment l'appellation «Avenue verte» aura peut-être un sens.
Et même, peut-être, celle de Réseau express vélo, car, entre Cergy-Pontoise et Arques-la-Bataille, s'enfilent déjà la ravissante voie verte de Bray-et-Lû à Gisors (Eure, 28 km) et celle de Forges-les-Eaux (Seine-maritime, 47 km) qui est très bien aussi. Toutes deux bien aménagées et bien signalées, et ombragées à souhait, la première surtout. Toutes deux existaient avant. A la louche, nous avons donc sur l'ensemble du linéaire 1/3 de voies vertes et 2/3 de routes grandes et petites ou sentiers, dont une bonne partie n'est pas à plat.
Pour l'heure, place aux côtes, aux agréables petites routes, quelques unes plus importantes, et aussi aux objets bizarres (route en herbe...).
La fréquentation est déjà là
Le long du parcours, j'ai vu pas mal d'Anglais et d'Italiens : On dirait que le concept «Paris-Londres + Jeux olympiques» est porteur. D'ailleurs côté communication, surtout en Seine-Maritime, on n'a pas lésiné. Cela n'a pas pour autant provoqué un quelconque professionalisme dans les services.
Savent-ils qu'ils ont inauguré quelque chose
qui n'existe pas ?
Accueil, campings et restauration pas vraiment olympiques
Il y a d'abord eu ce grand camping municipal dont tout le monde sait, sur le linéaire, qu'on n'y voit jamais les responsables. Ni en arrivant, ni pendant, ni en partant. J'y ai passé la nuit entre des musiciens et des chahuteurs, chacun s'adonnant à sa raison sociale. Le matin, ce fut le tracteur-tondeuse, ainsi qu'une équipe en train de monter un barnum à 10 mètres de mes pieds. Les sanitaires valaient ceux d'un camping à la ferme.
Il y eu ce tout petit camping privé … dont j'ai apprécié le calme et la décontraction, puis ce château du 15° siècle. Seul le guide annonçait un camping dans ce «village-jardin», expression par ailleurs fort exagérée. Pas de panneaux sur la route ni à l'entrée. Mon flair m'a fait chercher l'accueil du château (une heure de recherche dans le parc !), qui propose en effet une aire naturelle de camping, laquelle était dévastée par une récente tempête. J'ai eu une chambre de pensionnat, puisque le château est un lycée privé, mais ni dîner ni petit-déjeuner. Là ce n'est pas la faute de l'hôtesse, loin de là, mais elle était à la fois guide touristique et gestionnaire des hébergements. Dans le village, le Café de Pays était fermé. Peu de campings, peu de commerces, peu de restaurants, pas d'accueil ni d'informations ...
Le café-épicerie «Le relais de l'Avenue Verte», annoncé à chaque carrefour depuis très loin, soit au moins 20 fois, et très fort aussi dans le guide, n'est rien. Ni garage à vélos ni grandes tablées de cyclistes, ni menus et horaires généreux (salades à composer soi-même, 5 ingrédients, ou chipolatas, le tout pile de 12 à 13 h 30). On y a même refusé de me servir une tartine beurrée avec mon café au lait ! A-t-on vraiment le droit de faire de l'affichage publicitaire comme ça dans la rue ???
Quant à «La gare de l'Avenue Verte», en gras et couleur sur le guide, avec une belle étoile... elle est vide et l'a toujours été. Pas d'affichage, pas même de point d'eau, de location de vélos, de stationnement sécurisé, d'abri, d'office de tourisme, pas même de toilettes !!! La gare est vide. Belle, rénovée, mais vide. Le guide fait ce qu'il peut pour nous allécher, il en fait peut-être un peu trop...
Dans tout ça, deux services, non annoncés sur place, correspondaient aux besoins : Une petite guinguette ombragée en bord de chemin à Beaubec-la-Rosière, vraiment agréable, et un point eau, toilettes et pique-nique abrité et magnifique à Neuville-Ferrières. Plus quelques commerces annoncés modestement au dernier moment.
Je ne vous parlerai donc pas de ces villes où il n'y a plus de commerces en ville, ni du siège d'un parc naturel qui placarde vous accueillir, mais qui n'a même pas le point d'eau annoncé, ni de tous ces villages dont l'eau n'est plus potable, ni de la jonction entre la fin de la voie verte et Dieppe (8 km par une route urbaine bien moche !!!) ... Sur ce dernier tronçon le jalonnement est bon si l'on est très attentif (mais tout repose sur lui, ce qui rend l'affaire fragile), et la gare de Dieppe est de plein pied ! Elle a aussi très peu de machines pour acheter les billets, et un personnel fort aimable : une bonne gare pour les cyclistes, même étrangers.
----Au total, c'est une cyclo-randonnée à la campagne qui en vaut bien d'autres. Elle est dotée de deux belles voies vertes et de quelques charmants bords de rivière, mais est handicapée par ses accès, notamment Paris, sa petite-couronne et Cergy-Pontoise. --Pour "L'Avenue Verte London - Paris" triomphale, mythique et olympique, par contre il faudra attendre. Des infrastructures adaptées et une meilleure maîtrise des services signeront l'avènement de cette Véloroute de liaison entre capitales. Elle pourra alors être vraiment inaugurée. ----------------
De toutes façons, la suite est pire. Le guide recommande, en Angleterre, de souvent prendre le train, d'avoir des «pneus solides», de n'y aller que si on est bon cycliste, pas trop chargé et pas trop fauché. Le plan de l'accès à Londres vous confortera dans l'idée que, après tout, on n'est pas mal en France. Quant aux Anglais, ils s'attendent à débarquer dans Paris à travers un parc !!! Nous leur souhaitons bien du bonheur.
- Première partie de l'itinéraire, de Paris au bas de Cergy.
- "Let's go to olympic games", titre de l'éditorial de la brochure actuellement diffusée.
- Peu après je reçois la visite d'Adrien Caillot qui part sur cette route. Voici son récit et ses photos :
- Mon arrivée à Paris, et notre rencontre. http://adrien.caillot.free.fr/?p=1310. "Comment puis-je reconnaître quelqu’un que je n’ai jamais rencontré ? Tout simplement parce que j’ai déjà vu sa photo sur son blog, qui n’est autre que le plus célèbre blog français sur le vélo." (Merci !)
- Première étape sur l'Avenue Verte. http://adrien.caillot.free.fr/?p=1452
- Seconde étape. http://adrien.caillot.free.fr/?p=1804
- Et ma première journée en Angleterre, où j'ai mis en application avec succès tes conseils d'organisation de mes sacoches. http://adrien.caillot.free.fr/?p=1931
08:04 Publié dans Cyclotourisme | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : véloroute, seine-maritime
Commentaires
Pour avoir pratiqué à plusieurs reprises cet itinéraire, jusqu'à Gisors et jusqu'à Dieppe, depuis Enghien les Bains (via Auver s/ Oise et Nesles la Vallée) ou depuis Paris (itinéraire officiel), je confirme que cette "avenue verte" n'en est pas encore une.
En revanche, comme le dit Isabelle, à partir de Nanterre c'est un bel itinéraire de randonnée auquel ne manque qu'une signalisation continue pour éviter de trop jouer les aventuriers en terra incognita.
Terrains ou aires de bivouac/camping et points d'eau potable (pour les jours de canicule !) en plus grand nombre seraient également les bienvenus.
Écrit par : Jean-Jacques | jeudi, 08 août 2013
Avec la trace GPS Londres-Paris est faisable. Sinon ça me paraît difficile, le manque de signalisation est étonnant pour une véloroute inaugurée il y a plus d'un an.
Les deux points noirs sont les deux capitales, mais j'ai pu y découvrir quelques endroits sympas pour faire du vélo.
La partie anglaise ne possède quasiment aucun panneau propre (il faut suivre différentes véloroutes anglaises), et le parcours emprunte quelques petits chemins pas très roulants mais agréables.
Bref le concept de relier les deux capitales est intéressant, mais il n'est pas encore à la hauteur pour des familles, et très bien pour des cyclistes itinérants "confirmés".
Écrit par : noxyvelo | jeudi, 08 août 2013
Excellent (je parle du texte) ! Pour avoir fait Forges les Eaux - Londres, je trouve (chauvinisme) que la partie normande mérite le nom d'avenue verte, même si l'accueil périphérique est perfectible. En Angleterre, seul le côté exotique est sympa, mais les pistes sont un peu tordues et mal placées et l'on finit souvent par prendre les grands axes, au risque de se faire raser de près (les bas-côtés qui pourraient comme en France faire office de voie pour vélos sont inexistants).
Mais je rêve d'aller jusqu'à Paris un jour, même si, pour le coup, l'appellation avenue verte semble (pour l'instant espérons !) usurpée.
Merci !
Écrit par : Minto | jeudi, 08 août 2013
Approbation aussi de Velomaxou, sur son blog : "Paris-Londres, une voie verte en tenue de combat".
Écrit par : Max | jeudi, 08 août 2013
bonjour Isabelle, merci à vous d'avoir cité le camping de l'Avenue verte dans votre blog. Nous sommes contents de vous avoir rencontrée et d'avoir échangé plein d'infos sur le vélo avec vous. Bon courage pour la suite et à bientôt.
Écrit par : Audrey et David | mardi, 13 août 2013
Bonjour,
Je garde un meilleur souvenir que vous de mon périple sur cette "avenue verte". Il est vrai que nous avions fait le choix de sortir de Paris en train jusqu'à Vernon, ce qui est très faisable (rampe d'accès pour la sortie de la gare de Vernon).
Nous étions bien renseignés au préalable et avions prévu tous nos arrêts.
Je confirme que la partie anglaise n'est pas bien balisée du tout, et nous avons aussi suivi les autocollants de nos amis italiens de Verde Natura, bien plus présents que la signalisation officielle. Je pense que les concepteurs du revêtement aiment leur patchwork anglais, car le revêtement change tous les 3 mètres! Pour notre équipée composée pour moitié de vélos très chargés, pour l'autre de rollers, c'était difficile à gérer.
Nous avons fait un blog (signature) sur notre périple.
Bérengère
Écrit par : Bérengère | lundi, 19 août 2013
Bonjour Isabelle,
Juste une précision concernant le point d'eau annoncé à la Maison du Parc naturel régional du Vexin français à Théméricourt. Il y en a même deux! Les cyclistes peuvent en effet remplir leurs gourdes soit dans le Musée du Vexin (à gauche de l'entrée) soit aux toilettes du château (à droite).
Au plaisir de vous accueillir.
Écrit par : Irène Hedrich | lundi, 09 septembre 2013
En ce qui concerne le relais de l'avenue verte de Saint Vaast d'Equiqueville les parcs à vélos sont bels et bien existants. Même si la brasserie est ouverte de 12h à 13h30, il est possible d'avoir à tout heure coupes glacées, sandwichs en terrasse et multitude de nourriture à l'épicerie. Le bar sert des petits déjeuners complets de 7h30 à 11h. Il faudrait donc s'abstenir d'écraser les petits commerces, tout en sachant que le livre d'or ne recelle que d'excellents commentaires et qu'il n'est pas dû à tout le monde de tenir un commerce multi service (bar, tabac,épicerie, brasserie, point chaud, location de vélos, presse, dépôt de gaz.....) à deux personnes tout au long de l'année 6 jours sur 7 et 12h par jour...
Écrit par : Caty | samedi, 19 juillet 2014
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