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jeudi, 03 décembre 2015

L'IKV c'est encore pire !

Avant-hier vous n'aviez encore pas tout vu... Le contenu de cet amendement (n° 674 à la loi de finances rectificative pour 2015) est bien pire que ce que je vous en avais dit. MàJ à 16 h 15


En fait avant-hier je ne vous ai pas tout dit, beaucoup par incrédulité et un peu par fatigue. Voici la suite du tableau.

Aux inconvénients déjà indiqués (facultative pour les entreprises, plafonnée à 18 € mensuels, soit moins de 1 € par journée travaillée), il faut ajouter :

 

- Ce sont des "frais réels", et non une indemnité forfaitaire. Il faudrait que notre cycliste fasse la liste des frais réellement engagés dans le mois, et les prouver par des factures ou tickets de caisse ! En gros il faut espérer que les coups de pompe soient payants, et que le prix des bons pneus diminue... ou qu'on s'amuse à accepter les tickets pour steaks hachés et nouilles complètes.

- Les montants perçus seraient à ajouter au revenu imposable, donc une partie repartirait dans les impôts.

- Le patron ne pourrait pas inscrire ces sommes dans le remboursement, mais devrait les maintenir dans sa marge, donc il aurait encore des impôts à payer en plus sur ces sommes.

- L'IKV ne serait pas cumulable avec le demi-remboursement des abonnements aux transports en commun, ce qui est, là aussi, contradictoire avec la promotion d'un nouveau "système" de déplacement, multi-modal. Les Jurassiens normalement prendraient le bus quand il y aurait trop de neige dans leurs alpages, par exemple, pour aller jusqu'à la grande ville et finiraient leur trajet à vélo. Mais avec cette loi, tin tin, c'est que vélo ou que bus (ou re-calcul jour par jour !!!!).

- La parution des décrets d'application paraît superflue puisqu'on a la réponse aux questions qui restaient (facultative ou obligatoire; montant), mais le fait qu'il s'agit d'une loi de finances fait qu'il faudrait la revoter chaque année, avec tous les risques habituels !!!

 

Elle n'intéressera plus personne

Autant dire que si ce texte était finalement adopté, le résultat serait tellement minable que probablement bien peu d'entreprises la mettraient en place (trop de papelards, à leurs frais, sans même que ça ait un écho dans leurs équipes), et que pas grand' monde en effet ne la réclamerait (trop de papelards pour récupérer trois fois rien, et encore, à condition d'avoir les papelards en questions, factures ou tickets), et que donc tout ça coule directement l'IKV.

Et même plus, on peut bien imaginer que si une entreprise souhaite encourager ses agents à utiliser un vélo elle se tournera vers d'autres méthodes, d'ailleurs tout à fait incitatives, celles-là : création d'un bon garage à vélos, mise à disposition d'une pompe solide, accueil d'un réparateur à dates fixes, concours inter-entreprises sur le nombre de kilomètres parcourus, achat d'une flotte de vélos d'entreprise, etc... et pour les gens pour qui même si peu n'est pas rien, ce n'est pas eux qui seraient en mesure de la réclamer. Heureusement il existe des associations qui les aident à se déplacer (don, vente ou prêt de vélos reconditionnés etc.).

 

Le ministère de l'Environnement traite bien mal le vélo...

Mais un des principaux réseaux d'aide par le vélo, l'Heureux Cyclage, précise qu'il attend toujours des nouvelles de sa demande de financement auprès du ministère de l’Environnement, envoyée au Printemps 2015. Il représente pourtant, fait-il remarquer, des structures locales qui proposent des solutions concrètes, et dont l’intérêt est reconnu dans tous les territoires. Comment pourrait-il être abandonné par un partenaire qui le suit depuis plusieurs années, se demandent ses dirigeants ? Et ce alors même que cette activité, ancrée dans l’économie sociale et solidaire qui est vantée au quotidien par le gouvernement, est créatrice d’emplois locaux.

 

Ecoeurement 

Comme a dit France-Inter ce matin, "Les associations de défense de la bicyclette sont écoeurées". Et la population avec. Cette indemnité était attendue comme un signe. Des témoignages montrent que des citoyens attendaient cette indemnité pour se décider à "oser le vélo". Les cyclistes, pas plus que quasiment personne, ne la souhaitaient pour les sommes en jeu, mais pour la noblesse du geste; pour la reconnaissance, tout simplement. 

Reste l'espoir que les sénateurs rejetteront cet amendement scélérat, et qu'ils seront suivis in-fine par l'Assemblée nationale. En tous cas l'effet de surprise ne jouera plus. 

 

 

Voir aussi : Le Gouvernement rabote l'indemnité kilométrique vélo. Actu-Environnement. Un article plus nuancé mais très bien informé. 

Et voici ce qu'en dit la FUB (communiqué tombé à 14 h, extraits) : 

L'amendement adopté avant-hier limite le montant exonéré d'impôt sur le revenu à 200 euros par an et précise son caractère facultatif, resté ambiguë jusque là. Ainsi, le cycliste qui dépasse les 800 kilomètres (à peine 2 km aller et 2 km retour sur 10 mois dans l'année) verra une partie de son indemnité imposée. Et il y a pire, l'exonération de charges sociales pour l'employeur disparait. En conséquence, le coût kilométrique pour l'employeur passe de 25 centimes à environ 38 centimes.

Le dispositif devient donc à la fois plus cher pour l'entreprise, moins intéressant pour le salarié... et facultatif.

L'Etat, qui compte sur la "responsabilité sociale et environnementale des entreprises", ne les y incite pas. Il ne donnera même pas le bon exemple puisqu’un acteur public ne peut verser d’indemnité facultative.

La FUB dénonce le décalage entre la communication autour de la mesure et son impact réel suite au "rabotage". Dans les conditions actuelles, l'efficacité de la mesure pour faire pédaler davantage les Français risque d'être nulle.

Nous lançons un appel : la planète a besoin de mesures consistantes, dignes de la COP21. Et non d'une "COMM21"!

11:36 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : ikv

Commentaires

En fait, le tableau n'est pas si noir ...
- L'IKV est bien exonérée d'impôts, simplement cette exonération est désormais plafonnée à 200 € (comme pour les cotisations sociales). Car ce n'est pas l'indemnité qui est plafonnée mais bien les exonérations fiscales. Si un employeur décide de donner plus, les sommes au-delà de 200 € seront soumises à charges sociales et impôts ;
- Concernant le cumul avec les autres remboursements, la nouvelle rédaction permet d'enlever un doublon: l'article cité dans le deuxième alinéa du L.3261-3-1 du code du travail concernant en effet les transports publics de personnes et les VLS, reparler de l'abonnement de transport était donc juste redondant. Le cumul est bien toujours prévu, mais seulement dans le cadre d'intermodalité, pas de multimodalité. C'est-à-dire que vous ne pourrez avoir de remboursements que sur des trajets géographiquement complémentaires de vos trajets à vélo. Donc pas un jour je viens en vélo, le lendemain en bus et j'ai à la fois l'IKV et le remboursement, mais je commence par 2 km en vélo, puis 15 en RER et là, oui je peux avoir à la fois l'IKV pour les 2km et le remboursement pour le train. Cétait déjà le cas dans la loi d'Août 2015.
- Sur le décret, le raisonnement est un peu rapide. Pour l'instant les 25 cts/km ne sont inscrits nul part, ni d'ailleurs les justificatifs à fournir par l'employé pour en bénéficier. Un décret est donc bien encore nécessaire.
Par contre je suis d'accord sur le fait que si les lois de finance peuvent modifier profondément le fonctionnement et les conditions de l'IKV, cela crée une épée de Damoclès assez insupportable.
- Enfin, concernant l'obligation pour l'employeur, en fait le code du travail tel qu'il est écrit aujourd’hui est incohérent, puisqu'il dit (L 3261-3-1) "l'employeur prend en charge, dans les conditions de l'article L3261-4" ("la prise en charge des indemnités mentionnées au L3261-3 est mise en œuvre soit par accord entre représentants syndicaux et patronaux, soit par décision unilatérale de l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou des représentants du personnel s'ils existent"). On notera donc que le 3261-4 n'a pas été mis à jour (ne cite pas le 3261-3-1) et que la rédaction du 3261-3-1 est clairement contradictoire puisqu'on dit à la fois "c'est obligatoire",et "en fait non c'est un accord d'entreprise".
Je m'excuse de la longueur du commentaire, mais le droit c'est compliqué.
En fait, l'amendement va clairement dans le mauvais sens, mais on va dire que c'est surtout du fait du "bricolage" de la loi sur la transition énergétique. Par exemple sur les 200 € de plafond, si l'on dit que l'IKV est mise en place dans les même conditions que le remboursement de carburant, il n'est pas totalement illogique d'y appliquer les même plafond.
Bref, le gouvernement aurait clairement pu homogénéiser par le haut, il a décidé de la faire par le bas, ce n'est pas très étonnant, même si c'est décevant, mais le tableau ne me paraît pas aussi catastrophique que ça.
(Ecrit avant l'ajout du communiqué de la FUB, ndlr)

Écrit par : Alexandre | jeudi, 03 décembre 2015

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J'attendais avec impatience le contenu de cette indemnité, ma femme faisant 32 kms par jour à vélo. Mais finalement, ce soir quand elle va rentrer, je vais lui dire "gouvernement de merde" et on boira un verre de rosé à la gloire de ces incapables.

Écrit par : Alain | jeudi, 03 décembre 2015

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