Isabelle et le vélo

J'avais lu Vélo Toro, du même Perrodil, un récit picaresque d'une expédition menée à toute bourre entre Paris et Madrid.

Ici mêmes prouesses, des 150 km par jour comme si c'était normal, sur des routes souvent bonnes, c'est à dire en sable bien tassé avec peu de cailloux saillants.

Le récit de ce jour est moins amusant que le premier, mais certainement beaucoup plus intéressant. Avis à ceux qui ont vécu en Algérie, avis à ceux qui y ont laissé famille ou souvenirs, voici une traversée d'ouest en est en 1895, en pleine période coloniale. Le métropolitain n'y a pas le plus beau rôle, mais notre auteur ne fait pas preuve d'inhumanité, et il loue la grande  et stupéfiante beauté du pays. Nous assistons à moult accueil, dîners, rencontres, car bien plus qu'aujourd'hui, les cyclistes étaient une grande fraternité. Enfin, une fois de plus, nous pouvons mesurer les évolutions. La route de la frontière jusqu'à Tunis était seulement en construction, alors que le train assurait déjà la liaison. Le confort espagnol ou français, quant à lui, se répandait partout.

Nul doute que le livre doit être lu, c'est même tout le mérite des éditeurs que d'exhumer ces vieux récits auxquels, sous leur antique jaquette, nous ne prêterions pas attention. Notre lecture serait aussi fluide que notre échappée si elle ne venait butter sur de trop nombreuses erreurs de ponctuation. Irrégulièrement réparties, du reste, comme les cailloux. Et d'origine, nous assure l'éditeur, preuve à l'appui. Mais quel tableau de la société et de l'état de la colonie au tournant du siècle !

A travers les cactus, traversée de l'Algérie à bicyclette (1895). - Edouard de Perrodil, JFE éditions. 232 pages, décembre 2011. Préface de Jacques Seray. 16,90 €