Une plaquette de l’association Rue de l’avenir nous raconte histoire et présent des politiques publiques en matière d’espace commun (rues, trottoirs, etc). Elle nous donne aussi de nombreux exemples étrangers. L’asso fait partie d’un réseau professionnel international.
Ce fascicule a pour objet de rendre compte des échanges entre praticiens -à titre professionnel ou associatif- et chercheurs européens sur le thème de la modération de la circulation au cours des trente dernières années.
Le maître-mot aura été « apaisement », et surtout pas « séparation » qui tend à détruire la ville. Les solutions urbaines sont conviviales et respectueuses de l’environnement. L’espace public est un bien rare qui est amputé et privatisé, soumis à la domination des modes motorisés. Nous devons garder en mémoire que la démocratie y est née : agora et forum ont accueilli les actes fondateurs des sociétés de droit.
Une histoire de nos villes depuis la fin des « 30 glorieuses »
Dès les années 70 on constate une augmentation du chômage et l’apparition de ce qu’on a appelé alors les Nouveaux pauvres. Beaucoup sont captifs de l’automobile eu égard aux conditions de construction des ensembles de logements, certes, mais aussi à la recherche de prestige social et de sentiment de liberté. Pendant ce temps-là les centre-villes se sont remplis d’automobiles et vidés de vie.
La modération de la circulation, ou apaisement de la circulation, c’est :
– réduire la vitesse et le volume du trafic afin de rendre compatibles la circulation automobile et la vie locale,
– permettre la cohabitation entre piétons, cyclistes, transports collectifs et voitures particulières.
C’est alors qu’apparaît le slogan « La rue n’est pas une route ».
A l’étranger
La brochure présente l’invention de la notion de « modération de la circulation » aux Pays-Bas, en Allemagne (d’abord surtout en Rhénanie-Westphalie), en Suisse enfin, avec le modèle bernois tant admiré en France. Le partage plus équilibré de l’espace est souhaité partout, de façon différente selon les pays, jusqu’à l’absence totale de signalisation. Vous trouverez également un joli résumé des réalisations espagnoles (Barcelone!) danoises et italiennes (Ferrare, Turin …).
Au total il s’agit de politiques d’urbanisme, ayant à voir avec les notions de ville compacte, ville polycentrique, ville archipel, ou urbanisme de la proximité, et de concepts d’organisation tels que « en doigts de gant »… ce qui nous mène aux quartiers sans voitures.
La France, héritière des plus grands
Le renouveau du tramway, les « luttes urbaines » et les « ateliers populaires » marquent les années 80 en France ou à Bruxelles. Mais la France est l’héritière d’Haussmann et d’Alphand, tous deux passionnés d’embellissement et de rationalité, ce qui peut expliquer une partie de notre retard. Le programme « Ville plus sûre, quartiers sans accidents » arrive en 1984 seulement. Ses actions et ses résultats sont ici présentés et ont valu à son tour à la France de nombreuses visites des spécialistes internationaux. C’est enfin en 1988 qu’est créée l’association Rue de l’Avenir France, qui regroupait plusieurs organisations telles que la Ligue contre la violence routière.
Aujourd’hui Rue de l’Avenir France et Rue de l’Avenir Suisse sont parmi les co-fondateurs du Réseau RUES, un réseau francophone d’experts « pour une mobilité urbaine conviviale et sûre ». Il comprend des correspondants au sein d’associations et organismes de Belgique, France, Luxembourg, Québec et Suisse romande.
La modération de la circulation est bien plus qu’un geste technique.
L’objectif est le bien-être et le vivre ensemble.
Des mesures plus récentes sont essayées çà et là, telles que la limitation des vitesses nocturnes et la création de réseaux express vélo. Enfin un fait nouveau est apparu avec les engins de déplacement personnels, qui entrent en concurrence frontale avec la marche. La marche est pourtant le socle de toutes les mobilités urbaines, et la ségrégation urbaine, qui recommence à augmenter, une des sources majeures des difficultés à vivre en ville.
« On aimerait que la marche soit aussi bien traitée que le vélo, remarque Anne Faure, présidente de Rue de l’avenir. Et comme le vélo, la marche est un moteur économique car elle développe le commerce de proximité. Et puis, des piétons, ça sécurise une ville. » « On a rogné sur les trottoirs car le piéton est une simple variable d’ajustement », déplore Paul Lecroart, urbaniste à l’Institut Paris Région. Le Parisien, 2 août 2020.
L’article poursuit : « Et puis, le déconfinement offre l’occasion de tester grandeur nature une programmation des carrefours à feux tricolores rééquilibrant les temps de traversée au bénéfice des piétons, voire de rendre possible les traversées en diagonale qui permettent de déconcentrer les flux, comme on le voit à Tokyo, Los Angeles ou encore Londres. »
Cette plaquette de 25 pages a été rédigée en 2018 à l’occasion des 30 ans de l’association. Elle complète parfaitement l’article de Marc Sauvez publié récemment sur ce blog, et sa valeur 2 ans après sa parution est entière.
Vous la trouverez sur le site de l’association avec de nombreuses fiches très utiles sur, par exemple, les abords des écoles, les enfants en ville, le Grand-Paris ou la marche parmi les modes actifs du déconfinement.