Une direction de la cohésion sociale refuse jusqu’à l’utilisation des vélos personnels pour les déplacements professionnels.
Une façon radicale de refuser qu’ils soient faits en vélomobile.
Un engin cher
Laurent Pottier travaille en plein coeur d’Agen, dans un service dépendant du ministère de la Jeunesse et des sports. Il s’y occupe de réglementation. Il souhaitait se rendre au bureau à vélomobile, et envisageait de l’utiliser dans ses déplacements professionnels. Mais pour cela il voulait être sûr que cela serait autorisé, car un vélomobile ça coûte quand même dans les 8000 €. Il dépose un dossier de demande, a un entretien avec la directrice, reçoit d’elle un accord oral, bientôt confirmé par écrit.
Il achète donc l’engin et commence par l’utiliser pour se rendre au bureau.
Arrive le moment où il doit faire sa demande d’autorisation officielle non plus pour ses déplacements des matins et soir mais pour ses déplacements professionnels. Et c’est là que ça se complique. Car entre deux la directrice est partie à la retraite.
La peur et l’ignorance
D’abord l’inspecteur Santé et sécurité au Travail (anciennement inspecteurs Hygiène et sécurité) émet un avis défavorable « dans l’intérêt de l’agent » à cause des risques routiers et de la responsabilité qu’aurait pris cet agent en cas d’accident. Néanmoins il indique que cela pourrait être autorisé sous certaines conditions strictement établies et sur un périmètre restreint à définir…
Plus haut dans sa réponse il avait dit que cela devait être possible, dans des limites importantes : L’usage d’un véhicule personnel doit être exceptionnel, on préfère le recours aux véhicules de service, en privilégiant les véhicules automobiles. Toute situation autre revient pour l’agent à s’affranchir du cadre normal du fonctionnement de sa structure. En outre il ne faudrait pas que cela entraîne des frais de déplacement plus importants que pour les autres agents, car cela créerait une « inéquité de traitement » entre agents.
La nouvelle directrice ne veut pas, un point c’est tout
Quoi qu’il en soit, le conseil d’hygiène et de sécurité doit émettre un avis.
La réunion du conseil est houleuse, mais les représentants du personnel votent pour cette autorisation. Cela ne sert pas à grand-chose car la directrice a changé, et la nouvelle ne veut pas. Les « raisons » quelle donne sont le temps de déplacement par rapport à une voiture, la responsabilité de la directrice en cas d’accident, l’usage d’un objet personnel… On voit.
Arrive le comité technique de février, qui traite de la sécurité et la santé des agents sur leur lieu de travail, et la question de l’usage de véhicule personnel et du vélo personnel est à l’ordre du jour.
Et voici ce qui en sort :
1°- Plus aucun véhicule personnel ne sera admis pour des déplacements pour les missions, vélo personnel inclus. 2°- Remise en cause de l’usage des vélos de service… car ils sont jugés trop dangereux par la directrice. 3°- Le moyen de locomotion pour les déplacements professionnels est la voiture de service. |
***VVV …
Il travaille dans un service du ministère des Sports !!!
Voilà comment des baronnies perpétuent la sédentarité et la pollution, tout en gaspillant l’argent de l’Etat. Voilà comment on se retrouve dans une situation absurde, et voilà pourquoi il est indispensable que des messages forts et clairs soient dispensés par le Gouvernement.
Le docteur Saladin nous rappelle que toutes les études montrent qu’il est 10 fois plus dangereux de ne pas faire de vélo que de faire du vélo. Simplement ce ne sont pas les mêmes qui auront à gérer les conséquences :
D’un côté les quelques accidents engendrés par la pratique du vélo (dont, soit dit en passant, le nombre s’effondre à mesure que la pratique du vélo augmente), de l’autre l’énorme masse de pathologies et d’absentéisme au travail engendrée par la sédentarité et la pollution atmosphérique.
Quant à Laurent, il continue à venir travailler en vélomobile, il le gare dans l’enceinte fermée du service, et ne bénéficie d’aucun remboursement, ni de rien. Pour les déplacements dans la journée, il prend les voitures blanches de l’administration, quelquefois diesel, et quand il peut il utilise la seule qui soit électrique. Et il s’interroge sur les motivations de sa directrice…
Je vous souhaite une bonne fête du travail… Le travail c’est la santé, n’est-ce pas, mais que fait le Gouvernement ?
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PS. Nous en parlions déjà dans la revue de presse de novembre dernier.
Voici l’image que nous avions alors publiée.
Merci Isabelle pour ce reportage intéressant et très bien écrit.
Nombreuses sont les personnes sédentaires qui croient que l’utilisation du vélo est très dangereuse en ville. Mais il y a aussi des cyclistes qui s’y sentent mal à l’aise, alors qu’il se croient en relative sécurité sur les petites routes à la campagne. Les statistiques prouvent le contraire.
Un problème de fond pour l’usage urbain d’un vélo/tricycle couché, c’est qu’il a un profil bas, donc très peu visible. Un petit drapeau sur une perche me semble être une précaution minimale indispensable. Porter un vêtement « haute visibilité » est aussi une précaution simple et utile, et pas seulement de nuit ni à la campagne.
Beaucoup de vélos servant aux trajets de tous les jours ont été achetés à l’origine pour une utilisation loisir. Il leur faut absolument un équipement complet : réflecteur rouge et lampe rouge à l’arrière, réflecteur blanc et lampe blanche ou jaune à l’avant, réflecteurs oranges sur chaque pédale, réflecteurs latéraux dans les roues (facultatifs si bandes réfléchissantes homologuées et propres sur les flancs de pneus). On peut mettre les réflecteurs latéraux ailleurs que dans les roues, soit à l’avant, soit à l’arrière : il doit donc y avoir l’une des roues au moins avec réflecteurs ou bandes, et cela uniquement dans le tiers extérieur du « diamètre nominal de la jante ».
En France la mise en marche des éclairages n’est pas obligatoire de jour, sauf lorsqu’il fait sombre ou pour passer un tunnel/trémie : ils peuvent donc devenir obligatoires quasiment n’importe quand, ce pourquoi je préconise un moyeu-dynamo ainsi que de bons éclairages LED solidement attachés. On sait quand on part, on ne sait jamais quand on va revenir, ni par quel temps !
Je suis cycliste quotidien à Bruxelles, et j’y roule en tricycle couché. Je suis tout à fait d’accord que les cyclistes de toutes tailles doivent être visibles, mais pour en revenir au vélo couché 2 ou 3 roues, le drapeau ne change rien à la perception du vélo par les autres usagers. J’ai des dixaines d’histoires à raconter à ce sujet là! Et la taille/hauteur au sol du cycliste n’a rien a voir avec le fait que l’on est vu ou pas. De plus un fanion sur un vélomobile, c’est comme mettre une voile sur un VD : tu casses toute l’aérodynamique de l’engin, son principal atout! Tu peux faire l’essai : met un fanion de 3m sur ton vélo droit ! Ceci dit en toute amitié cyclophile.
J’ai reçu la même réponse lorsque j’étais en activité à la DIRECCTE de Basse-Normandie : trop dangereux le vélo ! Si bien que la plupart des agents qui devaient se déplacer professionnellement parcouraient très peu de km avec un véhicule de service pour le garder immobilisé tout le temps de leurs réunions : aucun calcul économique dans tout ça, aucune réflexion sur la disproportion entre entretien d’un parc de véhicules pléthorique et l’usage qui en est fait au quotidien. Quant à moi, je me déplaçais quand même à vélo pour les réunions professionnelles mais comment aurais-je été indemnisée en cas d’accident ?
Je partage le commentaire de mme Corbin : tout cela est ridicule, c’est surtout l’ignorance et l’enracinement des habitudes qui conduisent à ces situations. Comme le dit Sylvie Pottier, coache sportive, tout est fait pour sédentariser la population … Drive machin … Drive truc …
Les belles paroles des gouvernements ne servent qu’à nourrir la presse.
Si la directrice ne sait pas faire de vélo et ne souhaite pas l’utiliser, ça la regarde, mais de quel droit peut-elle interdire aux employés de son administration de l’utiliser pour se déplacer ? Compte-t-elle également interdire la marche à pied (des fois que l’un de ses employés glisserait sur une peau de banane…) ?
Personnellement, quand j’étais salarié, je n’ai jamais attendu qu’on m’y autorise pour faire mes déplacements professionnels à vélo pendant la journée, alors que les habitudes de l’entreprise à l’époque étaient plutôt de prendre une voiture de service même quand il s’agissait d’aller dans le centre de Rennes, où le stationnement était compliqué et cher !
Ah oui, c’est assez fantastique de la part du ministère des Sports. D’une manière générale, je pense qu’il vaut mieux faire ses déplacements pro à vélo sans rien demander, et comme ça personne ne songera à t’interdire d’utiliser un moyen de transport gratuit pour l’entreprise.