Sur la Loire le passage des ponts pose encore souvent problème. La période des aménagements provisoires, et des élections municipales, aura été l’occasion d’avancer, en vrai ou en image.
Tours a tiré la lumière à elle pendant qu’ Orléans attirait les cyclistes. Sur les autres ponts entre ces deux villes les situations sont variées.
Le beau coup politique de Tours
Tours a fait un grand coup, elle a fermé le pont Wilson, central et historique, aux autos. Un tramway au milieu, tout droit de la place Jean-Jaurès à la place de la Tranchée sur environ 4 km. L’axe se poursuit au sud au-delà du Cher par un axe très large et rectiligne sur quelques 6 km, que l’itinéraire de la Loire à vélo emprunte partiellement. Le pont n’avait aucun trottoir, la partie côté Est est désormais réservée aux piétons. Et voilà que la voie restante, entrante, à peine 3 mètres de large, est offerte aux cyclistes. Marquages provisoires, barrières aux extrémités, le tour est joué. Un magnifique coup politique, mais les barrières … ça empêche de passer. L’ambition n’est peut-être pas de faire du pont Wilson un maillon dans des itinéraires, mais seulement un lien entre deux rives, et un lieu de loisirs. C’est en tous cas la proposition de deux architectes dont parle La Nouvelle République le 5 octobre 2020.
J’y suis allée voir, ai trouvé que les raccords n’y étaient pas et que la tranchée, décidément, je n’avais pas le courage d’en grimper la côte rien que pour voir qu’il n’y avait rien à voir de neuf. Cet axe très structurant n’a pas été amélioré et les cyclistes continuent à naviguer entre les obstacles. Au sud, quelques corona-améliorations ont été réalisées, notamment sur l’avenue de Grammont, mais entre les deux il y a la rue Nationale, pratiquement interdite aux cyclistes. Au total ça passe pas si mal et plutôt mieux que d’habitude. D’accord, mais avec le pont Tours n’a fait qu’un petit morceau, isolé et spectaculaire. Et puis me voilà à Orléans quelques jours plus tard. Le pont central et historique s’appelle le pont George-V. Au nord l’axe se poursuit jusqu’à la gare (1 km), et au sud jusqu’à Olivet (4 km) puis la forêt… Et là que vois-je ? des cyclistes, des cyclistes, des cyclistes tout le temps. Selon une configuration proche de celle de Tours, nous avons une voie d’un côté transformée en voie à double-sens pour les cyclistes et de l’autre côté une voie automobile (que n’a pas Tours) et un trottoir. Jeanne me dit : Nous l’attendions depuis si longtemps ![ (Jeanne nous raconte très bien la transformation de l’axe royal d’Orléans: Jeanne à vélo, 23 mai 2020 et comment la décision fut prise, le 16 mai.] C’était le noeud de la campagne des municipales, me dit aussi un écologiste rencontré à l’entrée du pont. En fait il y a eu sur-enchère entre candidats. A Tours l’axe donné aux vélos semble l’avoir été pour la carte postale, et n’est raccordé à rien, ni d’un côté ni de l’autre. Dans son axe la rue Nationale, très commerçante, est piétonne, et les cyclistes doivent se débrouiller avec un contre-sens dans une rue parallèle pour rejoindre la gare. A Tours on a aussi créé quelques pistes expérimentales sans les intégrer à des itinéraires, comme si c’était « juste pour voir ». Celui de la rue des Tanneurs, à gauche de la circulation (de part et d’autre d’un terre-plein central) est haché de rond-points avec des arrivées d’automobiles partout. J’ai d’abord cru qu’il fallait aller tout droit dans le rond-point !!! en plein embouteillage du soir … dans tous les cas les autos nous coupent la route. A Orléans les pistes provisoires expérimentent des axes utiles à des endroits aux quels on pense depuis longtemps sans se décider. Par exemple la trémie devant la gare et sur une partie des boulevards. On y avait mis des logos de vélo, pour inviter les cyclistes à passer, sans oser vraiment faire autre chose. Aujourd’hui on leur donne une vraie voie. Les dysfonctionnement sont vus et induisent des rectificatifs[1. Photos avant et après très instructives chez Jeanne à vélo, encore ! Une saison en jaune : quand le provisoire dure. On y voit certains des ajustements qui ont été faits.]. Et cela saute aux yeux. A Tours il y a des cyclistes sur le pont, mais on se plaît à songer à Bordeaux (Voir ici le discours par lequel Juppé ferma les deux côtés du pont de Pierre au trafic motorisé.) A Orléans il y a foule de cyclistes, et pas que sur le pont, tout l’axe est concerné. Dans l’une on a fait pour l’image, dans l’autre on a fait pour avancer. La première a eu les projecteurs tandis que la seconde a eu un succès immédiat. En 2020 Tours a élu un maire écologiste, Emmanuel Denis, contre le maire sortant de droite, Christophe Bouchet. La vraie différence entre les deux villes, c’est que dans l’une, outre la surenchère politique, la question était sur la place publique depuis longtemps, était bien connue du public, les dossiers bien travaillés, ET que le personnel technique était très motivé par le sujet, « notamment le directeur de la mobilité à la métropole », selon mon informateur[1. C’est une règle observée souvent, les bonnes politiques ne se font que si il y a un bon tandem, élu et directeur, qui se respectent et travaillent en symbiose et avec compétence. Je l’ai observé plusieurs fois dans le passé comme aujourd’hui.]. La différence, c’est aussi, tout simplement, que d’un côté il y a une réalisation prestigieuse et ponctuelle et de l’autre des réalisations intégrées dans des itinéraires. C’est aussi simple que cela. Le cycliste ne fait pas 100 mètres mais plutôt 5 km ! Beaugency et Meung ne font rien. Il n’y a pas d’autre pont à proximité. Mer a élargi les trottoirs de son pont juste en les élargissant chacun de 2 fois 10 cm ce qui change tout et est parfait. Sa gare est très appréciée, mais elle est à l’autre bout de la ville. Blois a sur son accès ouest un pont inauguré en 1994, et au centre le pont historique Jacques-Gabriel. ( Une passerelle, en amont de Blois, est en cours d’étude (voir la Nouvelle République du 17 avril 2020). Encore un héritage de l’action de Catherine.) La liaison entre les deux ponts se fait désormais par le bord de la Loire, selon les voeux de l’écologiste Catherine Fourmond qui avait beaucoup oeuvré en ce sens. (Pour l’historique des aménagements cyclables voir dans Bougez autrement à Blois). Et à Saint-Hilaire – Saint Memin, à l’ouest d’Orléans, ça n’avance pas : La ville propose un alternat au milieu et deux bandes permanentes pour les vélos. En face on croit que ce sera dangereux. (La République du Centre, 20 septembre 2020). De cet échantillon je retiens que les uns font ce qu’ils doivent, et avec soin, que d’autres le font plus pour le journal télévisé que pour la réalité quotidienne, et qu’enfin les derniers n’ont peut-être même pas vu qu’il y avait plein de cyclistes. A ces derniers on souhaite que la faucheuse ne danse pas trop sur leur pont, et que les cyclistes fassent plus qu’y passer … Je souligne aussi qu’il est difficile de départager en fonction de l’appartenance politique. Le soin d’Orléans
La différence est spectaculaire et ne se limite pas aux ponts
A Orléans l’axe se poursuit jusqu’à la gare par la mise à double-sens cycliste d’une voie entière.
Photo de dessous : rue des Tanneurs, expérimentation de franchissement de rond-point (il y en a deux) … Les pistes provisoires sont en face et derrière la photographe, dans l’axe de la rue, de chaque côté du terre-plein central. Elles s’arrêtent brutalement au prochain carrefour.
Les trois ponts sont aménagés confortablement pour les cyclistes, accès compris désormais. (Photo plus bas pour le 3ème)
Orléans a réélu son ancien maire de droite Serge Grouard pour la 4ème fois (L’ancien maire Olivier Carré a longuement tourné autour du pot, comme le raconte encore Jeanne à vélo.) Il l’a emporté après avoir combattu son dauphin Olivier Carré (qui lui avait succédé en 2015 après qu’il eut démissionné).Qu’en est-il des autres ponts sur la Loire entre ces deux villes ?
Bonjour Isabelle, sauf incompréhension de ma part, vous illustrez le paragraphe de Blois avec des photos du pont de l’Europe à Orléans.
A Orléans, il y a un 4ème pont (le pont Joffre sur lequel passe la RD2020) qui n’est pas aménagé. Il est situé entre le pont de l’Europe et le pont George V.
Bonjour, merci pour le reportage. Attention à la légende « Blois, accès et franchissement… » les 2 photos sont celles du pont de l’Europe, dont le trottoir partagé possède un revêtement fort malvieillissant et clafit de cloques. JPB
Merci de vos alertes. Effectivement j’ai fait erreur et j’ai donc rectifié.
Merci Isabelle de nous avoir donné du recul, nous, velotafeurs orléanais toujours prompts à râler 😉
– Voici un article de 2014, pour compléter tes observations et tes analyses : Loire à vélo: de rive à rive (1/3) d’Orléans à Saumur
– Pour le pont De Gaulle, voici déjà dix liens vers des articles pour compléter ton point de vue.
– Pour le reste, pour retrouver les articles, il te suffira d’insérer un seul mot clé, en haut à droite, dans le moteur de recherche, pour trouver d’autres références. En mettant le mot « pont » tu vas trouver de quoi alimenter tes observations.
[…] pertinente d’Isabelle Lesens sur les différentes traversées de Loire, entre politique pour le montre-couillon et réponse aux demandes des usagers au quotidien […]
Voici des photos récentes et des articles relatifs au pont Jacques-Gabriel de Blois et des éléments pour la traversée de la Loire à Blois, sur le pont François Mitterand. Il y a 18 ans, il était déjà question de « distanciation physique ».
Un petit tour dans ces textes et photos nous fait voir que le pont Jacques-Gabriel n’avait autre fois même pas de trottoirs, et que les deux ponts avaient fini par être dotés de bandes cyclables très étroites. Que de progrès !