MDB, à Paris un anniversaire qui faillit oublier les 50 ans passés

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Fêter les 50 ans de la plus ancienne association contemporaine de vélo en ville, le MDB parisien, et pour cela n’inviter à s’exprimer que des personnalités politiques locales1en plus elles étaient toutes du même côté de l’échiqier politique, cela pouvait paraître lunaire. Heureusement le tir a été rectifié in extremis, dans les jours précédents et jusqu’au matin-même.


Ce vendredi soir 13 décembre 2024 la salle des fêtes de l’ancienne mairie du 4eme est pleine à craquer. Vieux et jeunes militants, anciens adhérents et amis actuels du MDB sont là, pour les retrouvailles, et pour la fête peut-être. Les adhérents d’aujourd’hui ont évité l’entre-soi un temps envisagé2une première version de l’invitation la rendait réservée aux adhérents actuels, les autres participants devant payer !, pendant que les personnalités extérieures avaient été invitées à occuper la première partie de la soirée (voir le programme initial), la seconde étant réservée pour une pièce de théâtre.

Carine Petit, maire du 14eme arrondissement, et David Belliard, adjoint aux déplacements de la Ville de Paris, s’en tirèrent, l’une en parlant du passé (la Radiale Vercingétorix, Jean Macheras, l’adresse du MDB pendant quelques années, ses liens avec la banlieue via la place de la porte d’Orléans …), l’autre en livrant quelques recettes du succès de sa politique du vélo. « Agir massivement avec clarté et volontarisme politique » sont en effet ce qu’on retiendra de sa méthode. 

Valérie Masson-Delmotte, la grande scientifique qui fut co-rédactrice du rapport du GIEC, avait un handicap plus lourd. Elle s’en est brillamment sortie en donnant des repères historiques (premier choc pétrolier en 1974 etc) et en insistant sur des aspects socio-médicaux : le vélo est un vecteur d’autonomisation des enfants et un bon stimulateur cardio-vasculaire. Le vélo est aussi un véhicule agile qui nous aidera bien en cas de crise grave, comme les débordements de rivières. Chez elle l’Yvette a déjà débordé 3 fois en 10 ans. Elle signale en passant que le vélo ne figure pas dans le projet de stratégie bas-carbone (fin de la consultation hier).
Enfin elle a donné du baume au coeur des vieux cyclistes de plus de 50 ans : Les nouveaux cyclistes parisiens roulent exactement comme avant, comme s’ils étaient encore en auto, ce qu’elle compare au comportement danois ou néerlandais, où les cyclistes se comportent comme des poissons ou des oiseaux. 

Enfin, Pierre Garzon, ancien vice-président du département du Val-de-Marne, décrit les nombreux obstacles naturels situés dans son département, rivières, Marché d’Intérêt National de Rungis (des centaines d’hectares), et autant de communes que de lieux de décisions et financements. Rien de comparable avec Paris, remarque-t-il.
Il suggère une solution pour avancer plus vite sur le vélo, faire évoluer les attributions de la Société des Grands Projets (ex-société du Grand Paris, qui construit le grand métro) en lui ajoutant le réseau vélo.

Initialement cela aurait constitué l’essentiel de la soirée d’anniversaire. Aucun retour aux origines ni de bilan des 50 ans. Finalement, le 22 novembre au matin, l’idée germa que peut-être certains participants -on ne sait jamais, quelques passionnés- seraient contents de pouvoir avoir quelques informations sur le passé. Contactés en urgence, jusqu’au matin même pour deux d’entre eux, on se retrouve avec une dizaine d’anciens dont l’intervention est prévue … pendant le buffet, dans le coin au pied de l’estrade. Cette perspective peu valorisante est acceptée du bout des lèvres, et finalement, le soir, le buffet vite liquidé, la salle entière se ré-assoit et écoute nos récits religieusement !

Je commençais en donnant quelques aperçus sur Jacques Essel, le fondateur, décrivant sa personnalité, son comportement, les lieux, ses actions … J’insistais sur son positionnement anarchiste, rétif à toute collaboration avec les pouvoirs publics, et son rêve de « démocratie directe » qu’il n’appliquait évidemment pas avec son entourage.

Vient ensuite Michel Utgé-Royo, qui raconte qu’il est venu au vélo grâce à la banderole « Pour les couloirs à bicyclettes ». Il a vécu la période de l’accident de Jacques, en 1982, qui a poussé Jacques Chirac, alors maire de Paris, à s’engager dans une première démarche pro-vélo dont Martine va nous parler, avant que Jean Tibéri ne reprenne la démarche, de façon cette fois remarquablement efficace.
Michel s’interroge alors : Anne Hidalgo aurait-elle pu faire ce qu’elle a fait, après deux mandats de Bertrand Delanoë caractérisés par une quasi-inaction sur notre sujet, si Chirac et Tibéri n’avaient pas ouvert la voie ? 

Puis Martine Jouneau raconte donc la manifestation qu’elle avait organisée à la demande d’un Jacques hospitalisé suite à son accident place de la Bataille de Stalingrad. Ils étaient très peu de participants, mais le passage au Journal télévisé du soir en fait un évènement national. Chirac veut les voir, Jacques leur demande de ne pas y aller car pour lui c’est forcément un piège. Ils y vont (et Jacques les rejoindra), et au bout de deux réunions se retrouvent à travailler avec les services techniques. La solution retenue est de faire des couloirs à gauche des couloirs de bus (ou au bord de la chaussée, parfois à gauche, dans les autres cas), donc par-dessus la voie de circulation sans être de la même largeur. Cette solution ne leur plaît guère mais fut imposée par la RATP qui craignait de voir les cyclistes dans ses couloirs.
L’accueil catastrophique que ces « couloirs de courtoisie » ont reçu de la part des médias leur a donné raison. 10 ans de perdus, ai-je coutume de dire.


Laurent Lopez ensuite évoquera, avec Abel Guggenheim, l’époque Tibéri puis le lancement de la première vélo-école et leur découverte que des adultes ne savaient pas monter à vélo. La méthode utilisée fait rire aujourd’hui (en tandem puis en tenant sous la selle, comme avec les enfants), mais heureusement d’autres méthodes ont vu le jour ensuite. 

Stéphane Lecler s’est souvenu des TPV (Travaux Pratiques Vélo), inventés par Abel (on en parle un peu ici), qui ont permis que les conducteurs des bus de la RATP se rendent compte qu’ils préféraient les vélos dans leur couloir plutôt qu’à leur gauche, mettant fin au blocage initial. 

La fin de la soirée, après le gâteau d’anniversaire, consista en des présentations trop rapides des derniers présidents. L’un a lancé les Convergences3sorte de grande manif annuelle, l’autre obtint l’application des nouveautés réglementaires, en particulier des « cédez le passage » aux feux, un autre fit évoluer le nom.
Un autre enfin mit fin au refus de recevoir une subvention de la Ville, ce qui a permis de confier la logistique à un salarié et de consacrer le temps disponible à une montée en compétences, devenue indispensable pour être un interlocuteur utile. 

La forte attention portée à ces deux séquences de témoignages retraçant sommairement l’histoire de l’association montra de façon certaine qu’un anniversaire de cette envergure ne pouvait pas faire l’impasse sur le passé, avant de, sans doute, réfléchir à la situation présente et du futur proche. 

Au-delà de l’histoire d’une association, l’histoire du vélo à Paris reste à écrire. Après la belle exposition du Pavillon de l’Arsenal, qui organisera le colloque, qui écrira le livre ? 

Abel, dans sa chronique du lundi, dit un peu la même chose que moi. Cause commune, 93.1 FM #275  16 décembre 2024. A 20.12 minutes sur 29.52.

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Vincent
30 jours

Il est dommage de ne pas avoir capté cette rencontre.

Pierr Charlo
23 jours

« Abel, dans sa chronique du lundi, dit un peu la même chose que moi. Cause commune, 93.1 FM #275 16 décembre 2024 » de 25:02 à 28:10 (et non à 20.12) minutes sur 29.52.

J’ai bien aimé les intervenions d’Isabelle (sur le début soixante-huitard de MDB) et de Pierre Toulouse (qui semble avoir été un président important pour donner à MDB son visage actuel). Il y a bien un article de l‘histoire de MDB sur son site, analogue à celui de carfree ainsi qu’un article de Wikipedia, mais les interventions à cette soirée de son cinquantenaire laissent espérer qu’un peu plus de souvenirs seront, un jour, publiés.

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