« Vélo&Influence » nous avait-on dit pour cette invitation de Mai à vélo devant se tenir le 15 avril 2025 au siège du ministère des Transports. Vélo et Influence me suis-je dit, oui, c’est bien, j’ai de l’influence, et j’ai pas mal d’idées sur ce que pourrait faire le Gouvernement en termes de communication influente en faveur du vélo. L’affaire me plaisait.
Mais il ne s’agissait pas de ça.
La salle n’était pas pleine et la disposition, en arcs de cercle se faisant face, a vite tourné au désordre tranquille bien confortable. L’assemblée était faite de cyclistes, certains bien connus dans le petit milieu. Là je me suis dit qu’on allait se parler à soi-même, alors que les objectifs, avais-je cru comprendre, étaient de parler aux non-cyclistes pour qu’ils deviennent cyclistes et aux cyclistes pour favoriser la compréhension mutuelle, entre eux et avec les autres usagères et useurs de l’espace, ou pour leur expliquer clairement les règles présidant à leur pratique.
Au total tout a tourné sur l’idée de voir comment attirer de nouvelles personnes au vélo. Jusqu’ici cela pouvait encore tenir dans mon schéma dans lequel il s’agissait de la communication de l’Etat …
Voici ce que j’ai retenu de la journée
-1- Le ministre Taborot, interrogé sur le contenu du rapport attendu sur la violence routière, a parlé de règles et de respect du code de la route, tout en répétant qu’il s’intéressait à « tous les usagers de la route, y compris les modes doux ». Il donnait ainsi une sorte de programme à son action, avant même d’avoir lu le rapport. Ce n’est pas de bon augure. Rappelons qu’il est signataire d’une proposition de loi visant à « créer une dérogation aux obligations prévues pour l’aménagement des pistes cyclables », et qu’il est très mal vu des cheminots (voir wikipedia)1. Lire aussi une information dans la revue de presse de Janvier 2025..
-2- La rencontre a surtout consisté en la présentation d’activités touristiques ou d’évènements, ayant tous pour objectif de faire venir plus de monde au vélo et pour ce faire en agrégeant le plus possible des non-cyclistes aux cyclistes. La place des réseaux sociaux et des « aventures » est donc apparue comme prépondérante, et des tuyaux pour les rendre rentables ont été échangés. C’est alors que j’ai compris ce que recouvrait le mot « Influence » du titre. il signifiait influenceur, qui mène droit à réseau social. Je crois bien que le mot « association », ou même « Fub », n’a pas été prononcé, ni ceux de presse, magazine ou blog. Ceci évidemment fera réfléchir sur les objectifs des associations. Pour les autres en effet ce n’est pas le sujet. Certes il m’arrive d’avoir de l’influence, mais je fais avant tout de l’information, et mon blog n’a certainement mis personne sur un vélo.
-3- Il a été entendu que les arguments classiques (d’environnement) n’avaient pas d’effet d’entraînement, et qu’en revanche faire envie était très efficace et pouvait s’incarner dans les mots et réalités de communauté et plaisir. Faire envie peut également passer par la mise en scène de figures emblématiques, c’est pourquoi j’ai évoqué comment le tabac s’était implanté dans nos vies d’étudiants : A la télévision d’alors écrivains, « hommes » politiques et journalistes fumaient et personne n’en parlait. Fumer donnait un air intellectuel, donc nous fumions. Certains ne s’en sont probablement jamais remis.
Plusieurs témoignages ont aussi rappelé le rôle de l’émotion et des souvenirs. J’ai attiré l’attention sur le rôle contre-productif autrefois de la mobylette (pour les garçons), aujourd’hui de la petite voiture sans permis. J’ai pensé qu’il y avait peut-être là une piste pour éviter l’abandon prématuré du vélo … mais ce n’était pas le sujet.
Il a enfin été entendu qu’il existait une porosité entre les différentes pratiques, ce qui a même fait ressortir le Tour de France comme possible évènement entraîneur. Moi il m’aurait fait fuir, mais après tout c’était il y a longtemps. Je me contentais de l’ignorer.
-4- D’autres thèmes ont été présentés, par exemple sur réemploi et recyclage, très intéressant mais sans rapport direct avec l’influence, si ce n’est d’appeler à ce que le vélo reste ou redevienne un objet « frugal », qui dure au moins 40 ans.
-5- Justement, concernant la baisse des ventes, il a été constaté que cela n’atteignait pas les constructeurs qui s’intéressaient aux vraies pratiques et que ces problèmes ne concernaient que les vélos de cadors, élitistes ou sportifs.
-6- Les freins au passage au vélo sont souvent liés au danger perçu, mais aussi à l’idée angoissante d’être visible, s’agissant notamment de femmes issues de certains pays. Il y a encore pas mal de différenciation sociale, le vélo étant aujourd’hui plutôt une affaire de centre-ville et classes moyennes ou supérieures. Le rôle de l’imitation, qu’on peut aussi appeler « mode », revient ici.
-7- Les chiffres sont encourageants. Selon M. Du Crest, coordonnateur interministériel pour le vélo et la marche, le vélo du quotidien en centre-ville augmente plus que la fréquentation des transports publics. 44% des foyers du pays ont au moins un vélo d’adulte. La SNCF, qui était aussi invitée, évidemment fait peu pour améliorer l’emport des vélos, et les vélos à bras ne sont toujours pas acceptés dans les trains.
-8- En conclusion on espère que les vélos pour handicapés seront nombreux au salon Vélo in Paris, l’objectif de tous étant que le vélo devienne « évident ». Les vélos Van Raam y seront et on pourra les essayer.
Lire Abel vient d’acquérir un vélo de ville parfait pour son âge
Liberté, plaisir et bonheur, a conclu Patrick Guinard, le président de l’APIC et figure montante de l’industrie du vélo. Mai approche, ce sera le mois du vélo !
-9- Ce n’est qu’après mes nombreuses relectures que j’ai enfin compris quels pouvaient être les objectifs de cette réunion. Embarquer les réseaux sociaux dans Mai à vélo ? Faire comprendre que les réseaux sociaux et les évènements avaient un grand pouvoir? Leur faire prendre conscience de l’importance de leur rôle ? Faire sentir aux regroupements traditionnels que leur influence est en baisse ? Il n’y a pas eu vraiment de conclusion de la journée.
-10- Ça y est, j’ai peut-être compris (nous sommes le 19 avril au matin), c’était se faire rencontrer les influenceurs, et améliorer le carnet d’adresse des autorités. Les faire s’intéresser à Mai à vélo aussi, peut-être. C’était ça, m’dame ?
J’ai la la même impression sur ce ministre (ex député). Sa réponse embarrassée sur la participation de la FUB au grand bidule des transports (encore un!), et notamment sur ses propos maladroits sur le « vélo à l’école », m’avaient alerté (après sa proposition de loi que tu cites). Son attitude sur les « trains de la colère » est révélatrice : Les trains de la colère sont arrivés à Paris, des centaines de personnes rassemblées devant la gare d’Austerlitz (France-bleu)
Enfin au moins sur la photo « tout le monde rigole » ???
Nous ne sommes pas près en France de rejoindre le nombre de cyclistes dont les Pays-Bas, le Danemark par exemple peuvent s’enorgueillir. Nous frisons le ridicule avec nos ministres complètement incompétents et omnipotents. Quel dommage cet échec permanent sur la mobilité. Un exemple de plus, nous sommes le seul pays d’Europe où les ZFE sont en échec total. Nous sommes la risée de tous les Européens.