Le commerce du vélo va bien, malgré une baisse des ventes de vélos, et une chute sur les vélos d’enfant.
C’est un gros paradoxe auquel s’affrontent les professions de l’industrie et du commerce de cycle, car ils sont bien conscients de l’essor du marché de l’occasion pour tous les types de vélos, et du caractère non-renouvelable des vélos à assistance électrique.
Le discours de présentation des chiffres du commerce pour l’année 2022, ce 6 avril 23, fut résolument optimiste, la valeur tirée des vélos et des vélos à assistance électrique est en hausse. + 7% en valeur globale pour 2022, trois fois plus de vélos et VAE vendus, c’est une bonne année. La seule inquiétude vient du vélo d’enfant, dont les ventes ont chuté. Inquiétude déjà mentionnée les années précédentes, inquiétude car il ne faudrait pas que les bambins se détachent du vélo. Sous-entendu, sinon notre marché s’effondre à moyen terme.
A noter l’intervention du ministre de l’Industrie, et non de la Mobilité, allant dans le sens de nos professionnels, et sur la même ligne que ce qui avait été dit à Saint-Etienne : le vélo est le fer de lance de la relocalisation industrielle, et cela nous oblige à (re)monter en savoir. Il faut soutenir l’assemblage en France, et cela se fera en synergie avec les industries de la mobilité que sont l’automobile et l’aérien.
Les magasins spécialisés, comme remarqué les années précédentes, vendent des vélos plus chers car de meilleure qualité que ce que font les magasins multi-sports ou les grandes surfaces. La vente de VAE par internet ne représente (heureusement) que 3%, mais plus que ce font chaînes de loisirs sédentaires comme la FNAC ou d’électroménager comme Boulanger. Les prix des VAE augmentent fortement, ce qui peut-être contribue à expliquer l’arrivée de VAE très bas de gamme, y compris sur internet.
La forte baisse des ventes de certains vélos s’explique par les achats importants de la période post-covid, et peut-être (ils ne l’ont pas dit) à cause du Coup de pouce qui a fait sortir des vélos des caves pour être remis en service. Cela et la croissance du matériel de seconde main, toutes catégories. Le marché français du vélo a connu en 2022 une hausse modérée : sa valeur a augmenté de 5,2%, mais le nombre de vélos neufs vendus a baissé de 7%.
Le marché du vélo est tiré par celui du VAE, ils représentent 28% du marché en volume, juste au-dessus des trottinettes électriques1Sur la mobilité électrique vous pouvez vous référer au magazine Make a Move, et notamment à son article sur les chiffres de 2022, avec un long passage sur les trottinettes électriques.peut-être grâce à de fortes subventions compensant un peu leur prix avoisinant fréquemment les 2000 euros. 1/4 des vélos vendus sont électriques, et ceux-ci représentent 61% de la « valeur » (les prix de vente).
Les vélo-cargos sont en forte hausse, multiplié par deux depuis les derniers comptages, et certaines familles en ont déjà un par adulte. Ils font même figure de mine d’or : leur prix moyen frôle les 4000 euros, on leur ajoute pas mal d’accessoires et ils nécessitent une maintenance importante.
La plupart étant à assistance, les industriels peuvent clamer que le VAE est leur avenir, la France rejoindra l’Allemagne ou les Pays-Bas en 2030. Les VAE tous styles représenteront la moitié des ventes, comme montré sur le graphe ci-dessous.
Evidemment les vélos ne sont pas compétitifs du point de vue du nombre d’unités vendues puisqu’ils sont très réparables et peuvent donc durer très longtemps.
C’est la quadrature du cercle ! Il faut vendre pour gagner de l’argent, mais s’afficher vertueux par l’entretien et le recyclage. Vendre cher pour vendre peu ? Vendre du simple très peu polluant, alors que le VAE pollue forcément, se périme vite et rapporte beaucoup plus ?
La question du recyclage des batteries est à double détente. D’un côté Corépile récupère et recycle 65% des batteries de vélo utilisées en France, leurs métaux étant revendus à la métallurgie, mais une partie d’entre elles pourraient être réparées. Métier très dangereux, nous explique-t-on, mais qui devrait se développer, semble-t-il, à condition d’une montée en compétence techniques, là encore.
Quoi qu’il en soit la profession va devoir élargir son champs d’action, et les points de vente pourraient devenir des points de services. Pour 450 vélos vendus chaque mécano en répare déjà 1000.
Parmi ces services se trouve la location, y compris en longue durée et aux entreprises. Cela est facilité par le Forfait mobilité durable et par le remboursement à 50% des frais d’abonnement à un service de transport ou de location, le tout sans charge fiscale pour l’entreprise. Il y a déjà 35 entreprises identifiées sur ce marché. Les ventes de petits engins électriques aux communes et communautés de communes sont un autre segment qui se développe.
Le rapprochement avec les industries du transport est un excellent présage du rapatriement du montage en France, surtout si l’on parle du haut-de-gamme. A l’automobile les moteurs et à l’aéronautique les métaux légers. Si l’on parle d’environnement c’est aussi très bien, mais à quel point ?
La question du marché du vélo pour enfant semble avoir joué comme un électro-choc. Ils sont encore largement majoritaires dans les ventes, mais en forte baisse. La profession, sortant clairement de son domaine de compétence, appelle donc à la réalisation d’aménagements cyclables. Pour eux il faut que les « pistes cyclables » soient faites « en dur », surtout celles qui sont à contre-sens de la circulation. En clair c’est « non aux DSC »2DSC : Double-sens cyclable, en français courant : sens interdit sauf vélos. … Il faut aussi des liaisons sécurisées à 100% entre école primaire et domicile, et là ils ont raison bien que cela ne soit réalisable que dans des zones point trop denses. Il y en a déjà par-ci par-là en France (si elles perdurent, Grenoble, Montpellier…) et c’est effectivement la seule solution pour redonner de l’autonomie à nos enfants.3L’autre jour j’ai observé avec intérêt un gamin tout seul ayant trouvé une bonne astuce pour traverser là où il n’y a pas de feu. Il se met dans le sillage du premier adulte qui traverse, il se trouve que ce fut moi.
Plusieurs messages de portée générale ont été dits à la fin :
- Il faut que les cyclistes soient respectés … et respectueux …
- La filière, dont le contrat sera bientôt signé, doit s’emparer de la question des infrastructures. Il en va du marché.
- Un appel aux communes : avant de faire des pistes faites du stationnement pour les vélos ! Si c’était le cas il y aurait 3 fois plus de vélos à Paris.
Qui va le mieux représenter la profession du Cycle dans la filière économique du vélo ? Les artisans et petites entreprises, regroupés autour de l’APIC comme on a vu à Saint-Etienne il y a 4 jours, ou les industriels, sous la bannière de Sport et Cycle ? Guinard (Patrick) contre Valentin (Jérôme) ? Quel rôle jouera Florence Gall, la déléguée générale de l’APIC pour la filière du Cycle ?
Ecouter En route pour demain sur BFM Business :
– Le marché s’essouffle-t-il ? avec Catherine Pilon, secrétaire générale du Club des villes cyclables.
– Comment renforcer l’industrie française du vélo? avec Karima Delli, députée européenne, présidente de la commission des Transports et Patrick Guinard, pdg de Velox et président de l’APIC.
L’Europe bouscule en même temps deux industries : l’auto thermique et le vélo comme mode de transport ! – Il faut lutter contre la peur d’aller à vélo, comme on apprend à nager à l’école.
Et tiens, bosser dans le vélo vous en rêvez ? Le Concentré vélo a préparé pour vous Job vélo, un Guide de préparation au CQP et TFP cycle. C’est un guide pour se préparer à passer ces examens.