Ça va mal chez les marchands-réparateurs de vélos. Que faire ? 

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Marc Duchesne

Dans l’agglomération paloise, deux magasins spécialisés e-bikes situés dans le poumon économique et industriel de Pau viennent de fermer, un troisième route de Tarbes aussi, qui n’aura pas tenu plus de deux ans, et une grosse boutique bien connue localement qui ne vend plus beaucoup de vélos neufs y compris vélos-cargo…

Dans cette tempête, s’accrocher à ses fondamentaux. Les trois shops qui viennent de fermer avaient vu trop grand. La folie de la période Covid, du Coup-de-Pouce Vélo, et des primes à l’achat de VAE… Trop de marques, trop de modèles, trop de motorisations différentes. A vouloir satisfaire les moindres besoins de tous les types de clientèles, on prend des risques incalculables, ou plutôt si : n’est pas Decathlon qui veut.

Quand Steve Jobs est revenu aux manettes d’Apple en 1997, il a épuré le catalogue de la firme à la pomme, alors moribonde, pour le réduire à trois lignes de produits. Vingt cinq ans après, Cupertino abrite le QG de la plus grande entreprise au Monde… Les fondamentaux de Steve Jobs sont faciles à trouver sur le Net, je vous laisse donc chercher. Parmi ceux-là: Savoir dire « non ». Pour se concentrer sur l’essentiel et pouvoir s’y consacrer pleinement.

Mon pote vélociste, son essentiel à lui (et bientôt à moi aussi, si tout va bien, à côté de mon aventure Pyrenees Cycling/Royal Asport/Regina Sport), c’est le vélo vintage et le rétro-mod. Pas de VAE: trop casse-gueule, la preuve. Pas de carbone aéro ou de cargo: d’autres le font déjà, et plutôt bien. Pas de montage & SAV pour les pure-players type Canyon ou Rose : pareil, et ce sont des « petits » aussi.

Et puis, il y a les services. Pour un vélociste indépendant, le répare-minute est fondamental. Crevaison, dérailleur HS, chaine qui saute… Puis la remise en état de sécurité, modèle « coup-de-pouce vélo », la restauration complète, etc.

Cela demande un véritable savoir-faire et une certaine expérience, qui n’est pas à la portée du moindre technicien Cycle venu. C’est là que se fait la différence. Mon autre pote vélociste, d’Oloron celui-ci, est lui aussi un vrai mécano, avec de la bouteille (de bière, le jeudi soir, mais ceci est une autre histoire). Il récupère les clients des shops alentours, beaucoup mieux achalandés que lui, tout simplement parce qu’il est le seul à savoir comment fixer tel problème ou changer tel composant rapidement et pas cher.

Alors… Alors en cette période de crise pour le marché du Cycle, je vous annonce que bientôt, j’aurai le bonheur de bosser en m’amusant dans un petit magasin de vélos quelque part à Pau. Eh ouais, #vivelevélo

ps: A très vite pour des news sur mes deux marques! Regina Sport et sa gamme de vélos [chut], et Royal Asport et son allroad au cadre acier dessiné et fabriqué par un des plus grands artisans-cadreurs au Monde…

Marc Duchesne est le patron de la société Royal Asport, propriétaire de Royal Asport Cycleworks et de Regina Sport Cycles à Oloron-Sainte-Marie.

Il se considère comme l’héritier de Joseph Habierre, le premier Espagnol à avoir participé au Tour de France voir ici. Habierre a couru le Tour de France en 1909 et 1910. En 1911 il a refusé une 3ème participation pour se consacrer à sa boutique de vélos, d’où le « 1911 » sur le logo de l’entreprise de Marc.

Deux marques historiques, une micro-usine, un projet : La renaissance de l’industrie du Cycle en Pyrénées-Occidentales.

  • J’ai « rencontré » Marc sur Linkedin grâce à son témoignage. Le texte que vous venez de lire en est la reproduction à la virgule près, et évidemment avec son plein accord après que je lui ai expliqué qu’il pourrait intéresser certains professionnels. Je n’ai fait qu’ajouter un titre et un intertitre, et un peu de gras et de couleur.
  • Revenir à l’essentiel c’est justement ce que vient de faire Velogik ! Dans leurs voeux voici ce qu’ils annoncent : L’année 2023 n’a pas été un long fleuve tranquille pour le secteur du cycle. Chez Vélogik, elle a été synonyme d’une profonde transformation pour nous recentrer sur notre métier historique : l’exploitation de flottes de vélos. 
    Vous vous souvenez sans doute qu’ils avaient élargi leurs activités à la réparation pour le public, et ceci de façon très organisée et avec du matériel très important. Cela n’aura duré que 2 ou 3 ans. Voir Les Ateliers-Vélogik redonnent de la noblesse aux réparateurs de vélos

  • Ils disent « Le marché du vélo sera compliqué en 2024 » (Cleanrider, 18 janvier 24), incriminant « Un ralentissement de la demande des consommateurs (…), car, après les années fastes du Covid et ses confinements et les retards de livraisons » pour les vélos à moteur, à cause des problèmes géopolitiques. Randroid écrit d’ailleurs, le 19 janvier 24 : « Le secteur du vélo et du vélo électrique1remarquez la nouveauté, on distingue les deux! va mal. En 2023, l’explosion de la bulle post Covid-19 a touché de plein fouet les petites, moyennes et grandes entreprises du milieu ». « On s’attend à ce que cette période creuse s’étale jusqu’à la fin du troisième trimestre 2024« . Ils parlent plutôt de la production. Après VanMoof, le dernier en date à fermer est Reinebike, et je doute que cela n’ait pas de répercussions dans les magasins, d’ailleurs Probikeshop avait été lui aussi au bord de la faillite. « La fin du boom du vélo et le début d’une vaste braderie des stocks s’accumulant en magasin ? » se demandait Outside le 3 novembre 2023. D’autres enfin pensent que seul le vélo d’occasion a encore sa chance.
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Djey
10 mois

▶️ Cela demande un véritable savoir-faire et une certaine expérience, qui n’est pas à la portée du moindre technicien Cycle venu. Oui.
▶️ Les gens de Velogik l’ont appris à leurs dépends. Eux qui ont cru y connaître quelques chose en mécanique vélo et sur la manière de gérer un atelier. Ils nous promettaient même l’ouverture de 15 ateliers en France dans l’année tout en nous donnant des leçons sur le métier… On espère, sans y croire, que cet épisode leur a appris l’humilité.

Marc Duchesne
10 mois
En réponse à  Djey

Velogik comme beaucoup d’autres ont pensé profiter du Covid. Ils ont vu dans le boom du marché du Cycle pendant la pandémie une occasion en or de se diversifier. C’était l’erreur à ne pas commettre. La grenouille qui veut se faire plus grosse que le boeuf …

marmotte27
10 mois

L’industrie du vélo et des « objets en forme de vélo » a transformé une chose simple, réparable, durable, sobre, aux standards bien définis et interchangeables, en un objet marchand, paradoxalement et malgré des prix parfois exorbitants, limite jetable car très difficile et donc cher à réparer, vu le nombre de « standards » non compatibles et des pièces de plus en plus complexes.
Voilà où mène la course aux profits. Même les meilleures choses peuvent en être détruites.

Djey
10 mois
En réponse à  marmotte27

Oui il y’a plus de complexité dans un vélo assistance électrique récent que dans un vélo ancien. Néanmoins les vélos modernes restent tout à fait réparables pour peu qu’ils soient au départ de qualité. Les vélos non réparables récents sont les vélos bas de gamme vendus à la pelle dans les grandes surfaces de sport. « Ça ne vaut pas le coup » de les réparer; un cadre mal conçu, on ne réparera pas ça. Et souvent non réparable car pour en faire des vélos décents il faudrait changer tellement de pièces qu’on dépasserait le prix initial du vélo.
Exemple : les Elops de Decathlon à 349 € sont des vélos jetables, classés comme vélos pour « trajets occasionnels ». Ils ne devraient pas exister, ils donnent une mauvaise expérience du vélo aux cyclistes (souvent débutants) qui roulent avec. On en produit des milliers qui finissent en déchèterie. Du point de vue des standards ils sont pourtant réputés réparables car basiques.
Sur l’aspect « cher à réparer » des vélos modernes c’est à mon avis à relativiser. Quand un vélo remplace une voiture et est utilisé tous les jours pour transporter un adulte et deux enfants il est normal que son entretien ait un certain coût. Si un compare ce coût à n’importe quel autre moyen de transport et aux avantages qu’il offre il est finalement faible.

marmotte27
10 mois
En réponse à  Djey

Freins à disques, cables intégrées, vitesses électriques, roulements intégrés, boites de vitesses, moteurs électriques propriétaires, batteries propriétaires, etc. etc. le tout aux multiples dimensions et « standards » incompatibles… plus la disparition de pièces à qualité correcte correspondants aux standards traditionnels…
Je maintiens ce que j’ai dit.

Administrateur
10 mois
En réponse à  marmotte27

et merci à vous deux de vous en tenir là. Vous pouvez continuer ici par exemple : https://www.facebook.com/isabelle.lesens/

Antoine
10 mois

J’ai connu il y a quelques années deux vélocistes.
▶️ Le premier avait des contacts à Taïwan où il faisait faire des très petites séries de cadres dessinés par lui, qui n’avaient rien de très particulier (route + VTT) et ne lui revenaient pas très cher. Il savait également comment obtenir des pièces (groupes, roues…) de fins de série ou de série des années précédentes qui devaient lui coûter 2 x moins cher — d’autant plus que le marché du vélo est tributaire d’une mode, et donc du démodage. Ça lui permettait d’assembler et de vendre des vélos à la carte. Il avait un atelier sur place en arrière-boutique et un autre, minuscule, où un vieux barbu montait des roues depuis des décennies. Tout ça dans un quartier pas encore gentrifié. Son affaire marchait et lui permettait de se faire un salaire et d’avoir deux employés mécano. Il m’a fait un vélo que j’ai longtemps apprécié et dont même la cassette était sur mesures (!).
▶️ Le second, toujours une petite boutique et dans le même genre de quartier, vendait des vélos plus standards. Une ou 2 marques, possibilités de montage à la carte. C’était un passionné (il avait fait aussi du vélo de cirque, des spectacles humoristiques/artistiques/poétiques avec sa collection de vélos introuvables). Il a en rapidement eu assez des clients qui venaient pour la crevaison (10€) ou la chaîne déraillée (7€) et se plaignaient que tout était cher. Sans doute ces gens trouvaient-ils normal de payer 100€/heure chez le mécano voiture, plus encore chez le dentiste. Il a abandonné après 18 mois, sans doute avec des dettes.

Il semble y avoir une mentalité que le vélo, c’est pas cher, et donc la réparation devrait suivre. D’ailleurs, ça a l’air tellement facile. Et ce sont des passionnés, le travail est déjà une récompense en soi (comme les profs, les artistes, etc.).

Marc Duchesne
10 mois
En réponse à  Antoine

Sur le premier vélociste, celui aux contacts en Asie : Ce genre d’activité est toujours possible, de manière durable et rentable pour tout le monde y compris les clients, pourvu qu’on n’ait pas les yeux plus gros que le ventre. Parce que quoiqu’on en dise, l’Asie est incontournable.
Sur le second vélociste, l’artiste-mécano : Peut-être a-t-il oublié (ou bien personne ne le lui avait appris) une règle fondamentale pour tout entrepreneur: Savoir dire non. Non au client qui entre dans la boutique avec un vélo tout pourri et qui veut qu’on le lui remette en état pour demain et pour 70 euros max payés en 3 fois… Non au client qui s’est plaint du coût d’une réparation rapide et qui revient quant même la semaine suivante parce que le Decathlon du coin lui a refusé la prise en charge.
▶️ En disant « non » à ce genre de clients, on s’assure 1) d’une meilleure tranquillité d’esprit, parce que 2) on travaille pour des clients qui nous respectent.

9 mois
En réponse à  Marc Duchesne

C’est exactement ce que faisait Cran cycles à Annecy.

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